30/06/2010

Dog Pound - Kim Chapiron




Ce qu'il y a de bien avec les salles obscures, c'est que l'on peut, parfois, y entrer tranquillement et en ressortir, quelques heures plus tard, très affecté. Il existe des films qui perturbent, qui choquent, qui bouleversent et qui ne s'oublient pas. Dog Pound, de Kim Chapiron, en fait partie.

Butch, Davis et Angel sont trois adolescents condamnés respectivement pour agression sur agent de probation, trafic de stupéfiants et vol de voiture avec violence. À Enola Vale, centre de détention pour mineurs, s'adapter n'est évidemment pas chose aisée ; le système carcéral répond aux mêmes règles que celles de l'extérieur, et celles-ci sont amplifiées.
La scène d'exposition enferme le spectateur dans une ambiance tendue ; on ne sortira pas indemne de cette prison. Et surtout, on ne pourra pas effacer le souvenir que laisse le personnage principal. La révélation masculine s'appelle Adam Butcher, sans aucune hésitation. Il est fascinant et troublant, son jeu est fin et criant de vérité, c'est l'une des grandes forces de Dog Pound. Et le jeune homme participe au réalisme déconcertant du film.
Il est difficile de soutenir certaines scènes du regard. Il n'y a pour autant jamais de violence gratuite. C'est la rage d'une jeunesse révoltée, tiraillée entre soumission et action, qui s'exprime et qui explose dans la saisissante scène finale. Les relations entre autorités et détenus, et la hiérarchisation des délinquants entre eux, sont à l'image d'une réalisation sèche, directe, tendue et toujours terriblement humaine. Enfin, l'ensemble est servi par une bande son très bien choisie : ni racoleuse, ni insignifiante.

Kim Chapiron signe un excellent long métrage qui a la puissance des courts.

29/06/2010

Ash + Alberta Cross + James Yuill @ La Maroquinerie, Inrocks Indie Club

 

Ash avait annulé son concert au Point éphémère en mai dernier. Une seule chance pour se rattraper : la soirée Inrocks Indie Club à La Maroquinerie le 23 juin,  avec Alberta Cross et James Yuill. Un peu d'électro, un peu de rock et un peu de pop pour ces concerts au goût amer... Arrivée à 20 heures, invitation récupérée et salle aux trois quarts vide.





James Yuill
Mea culpa, je ne connaissais pas l'artiste. Il y a tellement peu de monde que l'on peut s'asseoir sur les petites marches sans cesser de voir le londonien (que l'on croirait sorti de l'épatante série The Big Bang Theory) évoluer avec ses machines, entre son Mac, ses pads, son clavier et sa guitare. Le côté électro est intéressant, notamment à certains moments qui partent en minimale travaillée. Mais à cette heure-ci, le public n'est pas vraiment dans l'ambiance. D'autre part, la voix et les sonorités folk ne sont pas un choix judicieux : on perd en dynamique. Et quand James Yuill demande son avis au public pour la dernière chanson, ce dernier vote (assez logiquement) pour une instrumentale électro énergique plutôt que pour une chanson douce aux accents pop. L'ensemble reste honorable et donne envie de se pencher sur les deux albums studio.

Alberta Cross
Leur passage en novembre 2009, dans cette même salle, avait été un régal. Aujourd'hui, les fans ont fait l'impasse : la salle est à moitié vide et le public semble attendre Ash. Petit à petit, les membres du groupe ont du mal à cacher leur déception. Évidemment, ça suit toujours musicalement parce qu'ils sont très bons ; le leader, Petter Ericson Stakee, accorde même sa guitare au beau milieu de Broken Side of Time, sans qu'on ne l'entende. Mais le bassiste commence à vider plusieurs bouteilles de bières sur scène, et le batteur s'ennuie fermement. Petter donne beaucoup pour motiver tout le monde, mais le public ne répond pas présent et ne lui répond pas tout court. Alberta Cross joue dix chansons, quelques unes du premier album et de nouvelles compositions. Ils terminent sur l'excellente ATX et s'échappent, le visage tiré par des sourires forcés, pour boire un verre, ou plus...

Ash
Même si c'est le groupe le plus attendu de la soirée, et que cela fait des années qu'ils ne se sont pas produits sur scène en France, Ash n'a pas réussi à remplir La Maroquinerie. La majorité trentenaire et masculine s'est regroupée dans la fosse. Et c'est ce public qui va contribuer à installer une très bonne ambiance. La nostalgie a généré un enthousiasme hors du commun, le groupe lui-même est agréablement surpris par l'accueil qu'on leur réserve. Accompagné du guitariste de Bloc Party, les musiciens passent sincèrement une bonne soirée et livrent leur pop des nineties dans la bonne humeur. Tim Wheeler, chanteur et guitariste, éternel adolescent, ne faiblit pas une seconde. Sa voix tient sans problème, et le public tient à reprendre les paroles et à échanger des "yeah" et autres cris avec lui. À 23 h 45, le concert se termine sous les acclamations des spectateurs comblés. Belles retrouvailles !


Après, sur la terrasse, on a pu voir, entre autres, Austin Beede dans un triste état, et Tim, simplement adorable.

26/06/2010

Puggy @ La Cigale

"We are professionals", a dit Matthew Irons en entamant le rappel. C'était pour faire patienter le public pendant qu'il accordait sa guitare et tout le monde a souri, mais c'est vrai. Puggy a bien évolué depuis les premières parties des Smashing Pumpkins à Bercy et de Fiction Plane au Trabendo. Ils sont plus à l'aise et le public français les adore, surtout depuis la sortie des nouvelles chansons annonçant le deuxième album.


Après avoir tenté, en vain, de revendre ma place (je les avais déjà revus à la Maroquinerie en juin 2009 et au Glazart le 7 janvier dernier), j'attends la fin de la première partie, Madjo, et entre dans La Cigale un peu avant 21 heures. C'est la première fois que j'assiste à un concert en hauteur dans cette salle. Installé sur le balcon de droite, près de la scène, on voit bien. La Cigale n'affichait pas complet, et, pourtant, c'est plein.

Puggy, c'est un groupe qui sonne, c'est un groupe qui donne le sourire, c'est un groupe qui impressionne par sa facilité à créer une ambiance joyeuse, saine et sereine. Matthew, Ziggy et Romain sont des garçons simples et talentueux qui auraient de quoi prendre la grosse tête, mais non. Dès les premières notes de I Do, le public est réceptif. Puis, deux autres nouvelles chansons continuent d'enthousiasmer La Cigale, surtout les trois premiers rangs. Mais à l'écoute de Out of Hand et Sorry, force est de constater que les personnes présentes ne connaissent pas bien le groupe. Elles réagissent davantage sur How I Needed You. Les chansons extraites de l'excellent premier album, Dubois Died Today, plaisent mais ne fédèrent pas. Cependant, même si c'est l'aspect plus commercial des nouvelles chansons, comme Teaser, qui fait connaître le groupe, il est impossible de ne pas reconnaître la qualité d'un titre comme Burned. D'ailleurs, après le puissant break, Puggy ne peut reprendre le cours de la chanson : le public hurle de joie et empêche le groupe de poursuivre. Une ovation en plein milieu du concert, en plein milieu d'une composition.
À l'émotion s'ajoute la technique. Les trois musiciens maîtrisent leurs instruments et leurs voix. Romain, à la basse, participe aussi aux chœurs ; Matthew, qui chante toujours aussi bien, transforme parfois sa guitare acoustique en instrument électrique ; et Ziggy, performant, séduit tout le monde. Ce dernier est capable de jouer de la batterie et du clavier simultanément, et il chante également très bien. Apparemment, exceller dans son jeu de batterie et chanter en même temps n'est pas un problème pour lui ! C'est un grand.
Même si le choix des chansons n'est pas judicieux au milieu du set (de nouveaux morceaux, dont She Kicks Ass, et une version de Chez Madame Louise moins bonne que la version studio), la performance reste bonne. Arrive enfin Yeah Yeah Yeah Yeah !, l'une des meilleures chansons du premier album. Au début, Puggy avait déjà le goût des mélodies entraînantes, mais elles étaient originales grâce à un côté plus rock et des touches hispanisantes que n'a pas Something You Might Like, composition plus conventionnelle. Le public veut son rappel, il bouillonne. Il aura droit à seulement deux titres : Everyday, une nouvelle chanson douce, et, sans grande surprise mais toujours avec plaisir, Insane, qui clôture traditionnellement les concerts du trio. Matthew, Ziggy et Romain reviennent sur scène pour saluer et remercier sincèrement le public parisien qui leur a réservé un très bel accueil.


Une cinquième fois qui confirme que Puggy est une valeur sûre pour passer une bonne soirée, mais les nouvelles compositions n'ont décidément pas le même charme que les anciennes.

13/06/2010

Muse @ Stade de France, 12 juin 2010



Il fallait bien que le pire arrive un jour : ce deuxième concert de Muse a été gâché. Et ce malgré une prestation différente d'hier soir. Le problème ? Le public. Une catastrophe. Et même si je l'avais déjà ressenti à Bercy en novembre 2009 ou récemment au Casino de Paris, cela a pris une importance considérable. Se sentir seule en étant entourée de milliers de personnes pour qui c'est la sortie familiale du samedi soir, c'est déprimant. Un bilan mitigé, donc, de cette soirée inégale.


DeVotchKa
Après une nuit écourtée et une attente pas si longue que ça en bonne compagnie, la barrière m'attend. Le premier groupe à se produire est américain : il s'est fait connaître en composant la musique de Little Miss Sunshine. Le quartet multi-instrumentiste fait du rock-folk plutôt festif aux accents gitans. Sans émotion, en tout cas en cette fin d'après-midi.

White Lies
Premier moment de solitude. En voyant les premières parties programmées pour ces deux dates, j'ai cru que le passage de Muse au Stade de France se transformait en festival. J'ai été étonnée de constater que le public semblait ne jamais avoir entendu WL. Et j'ai été prise pour une extraterrestre parce que je connaissais les paroles. Découverts grâce à un ami, début 2009, dans une petite salle de Montréal (aujourd'hui fermée), je suis immédiatement tombée sous le charme. Leur album fait partie des dix meilleurs de 2009 selon moi. Mais le chanteur étant beau à mourir, leur passage à l'Élysée Montmartre en novembre dernier avait été légèrement profané par des cris de gamines. Au Stade de France, ils ont assuré une première partie impeccable avec seulement six chansons : Farewell to the Fairground, E.S.T., To Lose my Life, Unfinished Business, un nouveau morceau qui sera sur le deuxième album et Death. Harry a laissé sa timidité en coulisse, Jack est toujours aussi efficace à la batterie et Charles ne s'occupe plus que de la basse et des chœurs, le groupe ayant pris un quatrième membre claviériste pour les lives (comme Muse avec Morgan). L'absence des hurlements de groupies était un soulagement ; en revanche, la mollesse du public m'a déconcertée. Même une amie m'a vue des gradins car j'étais la seule à sauter...

Kasabian
Pour les Anglais du Leicestershire, le public a daigné montrer un peu plus d'enthousiasme. Mais pas tant que ça. Seuls quelques éléments ont vraiment profité des quarante-cinq minutes de show. Le groupe a pourtant joué pas mal de classiques comme Shoot the Runner, Empire, Club Foot ou encore Underdog et Fire (du dernier album). Mais on est bien loin de l'ambiance de leur Olympia du 8 février 2010.

La même playlist a été jouée entre les concerts. Cela a participé à réduire l'effet de surprise de l'ouverture du concert avec les manifestants.


Muse
Les trois premiers morceaux sont les mêmes qu'hier soir : Uprising, Supermassive Black Hole et New Born. La fosse s'est resserrée : j'ai avancé de quelques mètres donc je me suis rapprochée de Matt mais maintenant j'ai une visibilité réduite de Chris. Je vois toujours sa tête headbanger, mais c'est tout. Le premier changement de la setlist, c'est le remplacement attendu d'MK Ultra par Map of the Problematique. Certes MotP est énorme, mais je n'aime pas l'idée qu'on pense que ces deux chansons sont interchangeables.
Ensuite, la surprise est de taille : Muse ne joue pas Neutron Star Collision (Love is Forever) et offre un Butterfly & Hurricane qui ravit les plus vieux fans. Je cherche un regard ami, en vain. Tant pis, je profite toute seule ! On redescend vite sur Terre avec Guiding Light et son explosion de confettis. La setlist ne change pas jusqu'au premier rappel. Chris s'avance au milieu de la scène, magistral, pour entamer les premières notes d'Hysteria. À chaque fois que Matt ou lui s'avancent de la sorte, ils sont à deux mètres de moi et c'est un plaisir que de voir aussi bien leurs mains parcourir leurs guitares. En revanche, quand ils échangent leur place, une majorité des têtes de la fosse ouest se tourne de l'autre côté au lieu de profiter de Chris... Je fais face à tous ces visages.
Après Nishe et United States of Eurasia, Matthew demande comme la veille à ce que le public français l'aide à chanter la prochaine chanson : I Belong to You (Mon coeur s'ouvre à ta voix). Mais, ce que le public ne semble pas comprendre, c'est que croire qu'on l'aide à chanter c'est bien, hurler en pensant lui souffler les mots ça l'est moins. Et ça ne s'arrête pas là. Sur Feeling Good, je n'entends presque plus Matthew, sa voix étant couverte par celle d'un jeune homme dont c'est le premier concert de Muse. Heureusement qu'il ne connaît pas le MK Jam, qui précède Undisclosed Desires, parce que non seulement il chante faux (ce qui n'est pas un problème sur une instrumentale), mais il chante aussi les riffs de guitare ou de basse et les rythmes de batterie... Cet MK Jam, c'est l'un des plus beaux moments de la soirée. Dom est un dieu vivant.
Quant à Chris, je me fais la même réflexion qu'hier, mais pendant Resistance : il assure vraiment sur les chœurs. Côté public, ça se déchaîne sur Starlight et ça chante en français sur l'instrumentale House of the Rising Sun (intro de Time is Running Out). Honteux. De plus, hormis les points levés sur Unnatural Selection, c'est mou. Depuis le début c'est comme ça, mais là ça commence sérieusement à être pénible. Prendre une place en fosse uniquement pour protéger sa copine, c'est déjà scandaleux, mais ne pas bouger d'un millimètre et faire une tête d'enterrement, c'est à la limite du supportable.
Je tente de faire abstraction de cet aspect du concert, mais ne suis pas émerveillée par le show acrobatique sur Exogenesis (Part 1 : Overture). Je préfère me tourner vers la scène et profiter de Muse. Sans grande surprise, ils ne jouent pas la suite de la symphonie... La joueront-ils un jour ? Nouveau changement de setlist : c'est sur Soldier's Poem que Dom demande à tout le monde d'allumer son portable. Et ça fonctionne mieux que la veille sur Unintended.
La fosse de Muse est aujourd'hui composée de fans fragiles, incapables de passer deux heures sans boire dix fois. Les vigiles sont donc presque constamment perchés sur leur marche et gênent pas mal d'autres personnes. Stockholm Syndrome n'arrange rien ! Je suis la seule à sauter dans mon coin et une femme amorphe, droguée à la cigarette illicite, essaie de me coincer contre la barrière pour m'en empêcher. J'essaie de l'ignorer jusqu'à ce que je craque en lui demandant ce qu'elle faisait là si elle voulait être tranquille. Sa réponse : "gngngn". Je veux bien concéder à m'asseoir en gradins quand on me le demande, mais lutter pour vivre son concert en fosse me paraît aberrant.
En rappel, sur Take a Bow je dois me boucher une oreille pour ne pas entendre le fan qui chante les riffs, et sur Plug in Baby je continue à sauter, aidée par une fan qui enfin se met à bouger derrière moi (même si une partie de la fosse saute seulement pour toucher l'un des ballons en forme de globe oculaire). Enfin, après Man with a Harmonica, je ne tiens plus sur Knights of Cydonia : je sais que c'est la fin et qu'il faut que je ressente autre chose que de la frustration. Je me déplace en plein milieu d'un groupe de garçons qui se demandent ce que je viens faire là. "Pogotez-moi s'il vous plaît !", c'est ce que j'aurais pu leur dire. Je transpire deux minutes et les lumières se rallument. La chanson de Sigur Rós ne me rend pas le sourire, c'est dire combien la déception est grande. Je retrouve deux copains qui se trouvaient dans la même fosse : ils ressentent la même chose. Le public de Muse, ce n'est décidément plus ce que c'était.


Je mets au féminin une formule (entendue de la bouche d'un copain museux de la première heure) qui résume parfaitement la soirée : "Je suis venue, j'ai vu, j'ai aigru."

12/06/2010

Muse @ Stade de France, 11 juin 2010


Muse, premier round. Il est 17 heures, direction Stade de France, tout comme des dizaines de milliers de personnes. Mais, à mon habitude, je ne suis pas enthousiaste ; comme si c'était un événement sans grande importance. Je ne me rends pas compte. Peut-être est-ce parce que je les ai vus récemment au Casino de Paris ? Je ne sais pas. Premier problème : le code barre du ticket ne fonctionne pas. Petite frayeur. Second problème bien plus important : arrivée à ma place, je constate que l'un des énormes poteaux d'enceintes me barre la vue. Cela n'arrange pas mon état d'excitation zéro. Mais il est 18 heures passées et le premier concert a commencé...


I Am Arrows
C'est le groupe du batteur de Razorlight. Ils sont donc Anglais et jouent une pop-rock plutôt sympathique, presque pop'n'soul, mais pas transcendante. Ce qu'il y a d'intéressant, c'est qu'Andy Burrows prouve qu'il est aussi un très bon chanteur-guitariste. Cependant, je n'arrive pas encore à digérer la vue et à me concentrer sur la musique. De plus, il y a du mouvement autour : quelques rangs plus bas, les spectateurs ne voient vraiment pas grand chose...

The Big Pink
Le groupe est un duo anglais : un chanteur-guitariste et un bassiste. Mais ils sont trois sur scène, avec une fille à la batterie. Ils sont bien plus généreux que lors de leur passage à l'Album de la Semaine auquel j'avais assisté. Leur rock indie est assez profond, mais le cadre ne se prête définitivement pas à leur musique. Ce n'est toutefois pas mauvais, évidemment.

Editors
Je ne les avais pas vu depuis leur Bataclan en 2008 ! J'ai manqué leur concert à l'Olympia il y a quelques semaines (une longue histoire...). C'était donc une grande joie que d'apprendre qu'ils joueraient quarante-cinq minutes en première partie ce 11 juin 2010. Les musiciens sont toujours aussi bons (mention spéciale au batteur), et Tom Smith, showman à la voix chaude et grave, est parfait. Il donne du relief à l'atmosphère glaciale de leur rock britannique. Enfin, les chansons du dernier album, teinté d'électro, sont vraiment efficaces en live. Le bémol : des enceintes qui crachent et par conséquent une baisse du volume le temps de quelques chansons.

Ces premières heures ont été un peu frustrantes. Personne ne se lève, personne ne bouge... Pendant la performance d'Editors, je tentais de vivre le concert... Assise. Toutefois, il faut applaudir le choix des chansons pour patienter entre les prestations : Chemical Brothers, Arctic Monkeys, Radiohead, Prodigy, Daft Punk, Justice... Je vais m'arrêter là parce que Muse commence en avance : il est 21h20.


Muse
J'avais déjà remarqué la scène sublime, tout en perspectives. Mais Muse la rend magique. Des figurants envahissent le lieu munis d'énormes drapeaux. Matt, Dom et Chris ont encore une fois soigné leur entrée de concert en stade. Ils entament Uprising, tout le monde est debout et je ne vois plus rien à cause d'un grand monsieur. Je me déplace rapidement, plus près de la scène, pour qu'il n'y ait personne devant moi. C'est déjà l'hystérie sur Supermassive Black Hole et c'est encore pire sur New Born. Que ça fait du bien d'entendre New Born ! Et le bonheur ne s'arrête pas là puisqu'ils enchaînent avec la plus que parfaite Mk Ultra.
Première petite pause dans le plaisir : Neutron Star Collision (Love is Forever) suivie de Guiding Light. Je retourne à ma place, les sièges d'à côté sont inoccupés : je me décale et peux enfin profiter d'une meilleure vue. Tant mieux puisqu'Hysteria résonne dans le Stade de France. Puis, Nishe annonce United States of Eurasia qui fédère la foule. Tous les bras du Stade de France se lèvent vers la scène : impressionnant. Matthew introduit I Belong to You (Mon cœur s'ouvre à ta voix) en s'excusant pour son français ; la chanson a le mérite de créer un beau moment de complicité entre le public et le groupe. Moment qui continue sur la très connue Feeling Good.
Ensuite, Dom et Chris se retrouvent sur une scène mouvante pour interpréter leur jam plutôt électro. Dom est hallucinant, comme pendant tout le concert d'ailleurs. Ils repartent vers la scène principale pour prendre Matt au passage et reviennent au cœur de la première fosse pour Undisclosed Desires. Entre Resistance et Starlight, Dom prend quelques photos du public, avec son iPhone (traduction des paroles de Dom : "C'est fou tout ce qu'on peut faire avec un iPhone !"), et de Matt devant cet océan de bras et de mains. Arrivent enfin des chansons plus tendues, plus rock : Time is Running Out sublimée par la seconde voix de Chris, et Unnatural Selection et son break déjà mythique.
Premier retour sur scène avec "an old song" sur laquelle Dom demande que l'on allume nos portables : Unintended. Une fine pluie se fait sentir. On continue dans la douceur avec la première partie de la symphonie Exogenesis : Overture. Une sorte de soucoupe volante débarque dans le stade. Une acrobate en sort et effectue des figures au-dessus du public de la fosse ; ce qui n'est pas sans rappeler le numéro des acrobates suspendus à des ballons pendant Blackout au Parc des Princes en 2007. C'est joli et la symphonie est merveilleuse mais jamais jouée en entier. Alors on voudrait un peu de rock... Stockholm Syndrome ? Soulagement ! Il pleut de plus en plus et l'envie de terminer de façon nerveuse augmente en même temps.
Ils reviennent une dernière fois. Devant un public amusé, Matthew se présente en costume clignotant et lunettes rayées... Ils interprètent un Take a Bow qui fait énormément de bien aux oreilles et un Plug in Baby apocalyptique sous une pluie intense. L'ambiance est électrique et Chris fait monter la pression avec l'introduction de Knights of Cydonia : Man with a Harmonica. Pour l'anecdote, il jette encore son instrument dans la foule. Tout le monde sait que KOC signe la fin du set, alors tout le monde saute partout pour profiter des derniers instants. Muse remercie sincèrement le public français et lui dit à demain. Le groupe disparaît et le Stade de France se vide progressivement, une chanson de Sigur Rós en fond sonore...


Euh... Oui, à demain ! Une setlist différente ne serait pas de refus pour combler les absences de certaines.

11/06/2010

Sex and the City 2 - Michael Patrick King

Deux cosmos dans le sang et une copine, il faut bien ça pour aller voir Sex and the City 2. Le premier film était déjà bien inférieur à la série, mais là on tombe encore plus bas ! Michael Patrick King signe encore un mauvais film, mais c'est tellement ridicule que ça en devient drôle.

L'histoire, ou plutôt le prétexte : Carrie (Sarah Jessica Parker) se retrouve à Abu Dhabi avec ses trois amies grâce à une invitation professionnelle que Samantha (Kim Katrall, récemment vue dans The Ghost Writer) a reçu d'un richissime homme d'affaire des Émirats. Évidemment, l'héroïne y rencontre son ex, par hasard, au cours d'une journée shopping au souk. Alors qu'elle est loin de Big (Chris Noth), qui rêve de pantoufler dans leur nouvel appartement new-yorkais, elle prend des risques en acceptant de dîner avec Aidan (John Corbett).
Tout ce que le spectateur lambda attend est dans ce film. À commencer par le mariage gay des deux ennemis : Stanford et Anthony. Tout est bien qui finit bien. Passons sur l'apparition de Liza Minelli... Puis, les péripéties exotiques arrivent ; les dialogues creux et les séquences bâclées aussi. L'humour est tellement lourd qu'on rit de constater qu'ils ont osé. On verse dans le superficiel, les tenues improbables et les fausses réflexions des scénaristes sur la condition des femmes dans les pays arabes.
Les deux heures et demie, il faut les tenir... Entre les amours de Carrie, les aventures de Samantha et les problèmes des mamans Charlotte (Kristin Davis) et Miranda (Cynthia Nixon), il n'y a aucune construction. Les seuls éléments qui font que le film en est un, et pas une série d'épisodes mis bout à bout, ce sont des ficelles simples du cinéma que l'on voit arriver à des kilomètres. Une barrière se forme alors entre l'écran et le spectateur moins docile qui se demande également pourquoi Penelope Cruz a accepté une scène. Mais, dans la salle, ça papote et ça applaudit...

Entre filles, et cosmopolitanisées, uniquement.

10/06/2010

Them Crooked Vultures @ Zénith de Paris, le retour des Petits Pois !

Difficile d'enchaîner deux concerts, surtout après un live comme celui de Jónsi. Mon esprit est encore sur un nuage islandais, mon corps est assis au premier rang des gradins du Zénith de Paris. Mais le groupe qui joue ce soir ne peut pas me décevoir, il est déjà mythique : Them Crooked "fucking" Vultures ! Après les avoir vu en festival au Rock en Seine 2009 et en concert privé à l'Album de la Semaine, je ne pouvais faire l'impasse sur leur première salle en France.


Le Zénith me surprend à chaque fois : je me rends compte de nouveau que les gradins sont proches de la scène et que le son est mauvais. C'est bon pour les yeux, moins pour les oreilles... Nosfell est programmé en première partie. Le chanteur à la tessiture impressionnante, accompagné de son batteur et de son bassiste-violoncelliste (que l'on n'entend pas assez), livre une prestation étrange. On ne sait pas vraiment où se placer dans la réception de ce rock influencé par la folk, le trip-hop et la musique africaine. Cela semble intéressant, mais le son du Zénith est tellement agressif que l'on peut aisément décrocher.

Il est 21 heures, tout le monde se lève dans les gradins et une marée de bras se forme au-dessus de la fosse. John Paul Jones, Dave Grohl, Josh Homme et Alain Joannes sont applaudis comme si c'était la fin du concert ! Josh Homme (Queens of the Stone Age) présente le groupe : "Les Petits Pois !" C'est tout simplement parfait. Ils se souviennent de leur passage à Rock en Seine l'année dernière, ils font cette private joke avec les plus intimes du public français qui les suit depuis le début, et pendant presque deux heures TCV va incarner la générosité. En plus de sourire et de s'éclater, ils offrent, avec un seul album, un concert riche et maîtrisé, commencé par l'excellente No One Loves Me & Neither Do I.
Malheureusement, en gradins, l'ambiance s'essouffle très vite. Pendant la troisième chanson, la minorité rockeuse doit capituler et... s'asseoir ! La mollesse du public est scandaleuse. À l'Album de la Semaine, le public est en gradins, certes, mais debout. Néanmoins, si l'attitude du public assis (comme dans son salon) est honteuse, la fosse n'a pas belle allure non plus. Seul le premier tiers, au centre, est déchaîné. Autour, plus on s'éloigne de la scène, plus les gens parlent, fument et boivent des bières. Comment ne pas bouger sur TCV ? Comment ne pas se taire pendant des solos prodigieux ? Pourtant, c'est un tonnerre d'applaudissements qui conclut chaque morceau. À croire que le public, majoritairement masculin, n'est là que pour applaudir une performance de légendes et pas la musique en elle-même.
Oui, John Paul Jones a la classe, il est mythique, on veut scander son nom et on ne peut nier que ce multi-instrumentiste, ancien bassiste de Led Zeppelin, n'a plus rien à prouver à personne. Oui, Dave Grohl est l'ancien batteur de Nirvana et le chanteur guitariste des Foo Fighters, on reste bouche bée devant son jeu de batterie (il tape comme un sourd) et on se demande comment il fait pour chanter en même temps. Oui, Josh Homme est le leader charismatique des Queens of the Stone Age, il maîtrise aussi bien le chant, la guitare ou certains pas de danse langoureux et on sait qu'il fait tout ça naturellement. Mais la force de TCV, c'est l'harmonie. L'équilibre qu'ils ont trouvé entre compositions complexes et joie de vivre est divin. Avec Them Crooked Vultures, le rock reprend enfin sa force initiale ; loin des ersatz florissant depuis quelques années.
Le concert se termine plutôt brutalement. Les lumières se rallument vite sans qu'on ait le temps de demander un rappel... Mais avant de partir, les artistes ont remercié chaleureusement le public français et ont posé avec un drapeau de la France, pris dans le public, sur lequel étaient dessinés les visages de ces trois dieux du rock.


Encore du grand TCV qui mériterait un public plus attentif aux détails.

08/06/2010

Jónsi @ Bataclan

Il est impossible de raconter l'inénarrable. Mais je dois tenter d'écrire ce qui n'est déjà plus qu'un souvenir. Se taire serait pourtant la meilleure façon d'expliquer qu'aucun mot n'a la force des émotions vécues pendant cette soirée du 7 juin 2010. Alors, pour laisser une part de mystère, je ne me pencherai que sur deux des sept heures de cette expérience : Jónsi au Bataclan.


Patienter avant d'entrer dans la salle en entendant les derniers réglages de l'artiste que l'on va voir en concert, il y a pire. J'attends cet événement depuis des mois, même si je mets d'entrée un bémol sur le choix de la salle. C'était sans compter sur l'ingénieur du son de Jónsi...
Mais avant, il y a la première partie : Glasser. C'est un groupe composé de deux Américains : un garçon et une fille. Lui lance les sons et fait la deuxième voix ; elle chante et elle chante remarquablement bien. Malheureusement, l'univers est coincé entre celui de Björk et celui de Fever Ray sans rien proposer d'innovant. Et visuellement, c'est pénible. L'on peut passer à la suite.

L'attente est étrangement stressante. À 20 h 30 passées, le soulagement est immédiat : Jónsi arrive, d'abord seul avec sa guitare pour interpréter une chanson ("All by myself (I wanna be...) and with Doddi of course" est écrit sur la setlist). Sa voix est toujours aussi parfaite, impressionnante et touchante. Ses musiciens le rejoignent pour Hengilás. Un début tout en douceur qui continue avec Iccicle Sleeves (chanson non retenue sur l'album). Personne ne fait de bruit pendant les silences musicaux et tout le monde attend la fin des chansons pour exploser de bonheur. Un bon public est si rare qu'il fallait le mentionner.
On poursuit avec deux merveilles de Go : Kolniður et Tornado. Les frissons sont les bienvenus car il fait incroyablement chaud. Même Jónsi dit qu'il fait bien froid !... Il enchaîne avec la jolie et envoûtante Sinking Friendships (Thinking of Chickswithdigs sur la setlist), avant d'interpréter pour la première fois en live Sticks and Stones, la chanson du film Dragons. Un beau cadeau qui a nécessité qu'on fasse à Jónsi d'énormes antisèches au dos de posters ! C'était "funny" comme il n'a pas manqué de le préciser. Cependant, cela n'a pas été le seul moment de joie. Durant tout le concert, les musiciens (en particulier le bassiste et le batteur) ont affiché un sourire si sincère et si communicatif qu'il était inconcevable de ne pas partager ce bonheur. Il y a eu de véritables échanges et un respect profond de la part du public et du groupe.
Après une autre nouvelle chanson, Saint Naive, c'est une double folie qui envahit le Bataclan. Jónsi, Alex (son compagnon et musicien), Doddi (le batteur épatant), Úlfur (le bassiste enfantin) et Óbó (le pianiste discret) offrent les deux chansons les plus pop et connues de l'album : Go Do et Boy Lilikoi. Tout le monde est comblé, sur scène comme dans le public. De plus, la mise en scène est bluffante : elle participe au confort du monde dans lequel Jónsi veut emporter son public. Tout est fascinant : le travail musical sur les arrangements, les costumes, les effets visuels des décors sur lesquels sont projetées des animations vidéo...
Ensuite, parce qu'il joue parfaitement entre les nouvelles chansons et celles de Go, Jónsi termine le concert avec Piano Song et la très festive Around Us dont il sublime la fin : géniale au sens propre du terme. Parce que oui, Jónsi fait partie de ces rares artistes que l'on peut qualifier de génie. Et il a l'intelligence et la sensibilité de s'entourer des meilleurs. Personne n'est dupe : les cinq artistes méritent que l'on se fasse mal aux mains pour les remercier convenablement. Le public ne faiblira pas pendant les quelques minutes qui le séparent du rappel.
Le groupe revient sur scène et joue l'explosive Animal Arithmetic (Counting Tigers sur la setlist). Mais le plus intense réside dans ce qui vient achever le concert : une expérience hors du commun, tant physique que mentale, qui représente à elle-seule le talent de Jónsi et de ses musiciens. Pendant Grow Till Tall, Jónsi est transcendé : il jette une valise entre la scène et la barrière, renverse le pied de son micro qu'il offre au public pour les derniers "yooouuu". Heureusement qu'il ne l'a pas tendu vers moi car, après m'être retenue plus d'une fois, je craque. C'est trop puissant, trop intense. Je ne fais plus la différence entre les larmes que pleure mon corps à cause de la chaleur et celles qui coulent sur mon visage. Les cinq hommes reviendront une dernière fois, presque timidement, pour applaudir le public et le saluer. Ovation.


C'est compliqué et en même temps très simple : c'est l'un des plus beaux moments de ma vie.

04/06/2010

Enter the Void - Gaspar Noé

Doit-on juger de la qualité d'un film de Gaspar Noé au nombre de personnes qui quittent la salle de cinéma ? Dès le générique (musique rythmée et répétitive, images stroboscopiques), le spectateur averti sait que c'est du Noé. Le réalisateur a une signature audiovisuelle. Il ne connaît pas la demi-mesure ni les concessions. Il filme l'humain, ses travers et ses vices. En bref, il filme la réalité. Sur une trentaine de personnes dans la salle, un tiers est sorti pendant le film.

Oscar est un dealer. Il a promis à sa sœur stripteaseuse, Linda, qu'ils ne se sépareront jamais. Quand il se prend une balle dans le torse et meurt dans les toilettes d'un bar miteux, son esprit revient hanter Tokyo. Mais avant cela, alors que la scène d'exposition n'est pas encore terminée, certains spectateurs ne supportent pas le trip violent dans lequel Oscar est plongé après avoir inhalé du DMT. Ils n'iront pas au bout de l'expérience.
Cette réaction est peut-être due au fait que la caméra est derrière les yeux du personnage. Et tout ce qu'il voit et vit est choquant et provoquant. Une réincarnation pour le personnage principal ; un Tokyo sous acide pour le spectateur. Mais ce n'est pas nouveau : les films de Noé sont intenses. Il faut que l'esprit soit ouvert pour pouvoir comprendre. Cependant, si la réalisation est réfléchie, elle l'est parfois trop et on y voit une démonstration technique redondante.
Le film n'est pas divertissant, c'est un constat. Mais, en plus, Gaspar Noé repousse les limites cinématographiques en demandant un effort au spectateur. Effort d'autant plus difficile qu'il doit être réalisé en acceptant l'atmosphère pesante du film, appuyée par l'ambiance sonore créée par Thomas Bangalter (Daft Punk). Noé filme la vie en filmant la mort. Il filme le sang, le sexe, le trash, l'amitié, l'amour, la douleur, les cris, les traumatismes et les souvenirs.

Du cinéma franc.