29/06/2011

30 Seconds to Mars @ La Maroquinerie, concert privé

Même si on a déjà sa place pour le concert de 30 Seconds to Mars à l'Olympia le 15 juin, comment s'empêcher d'emmener sa fan de sœur au concert privé du groupe une semaine avant à La Maroquinerie ? Une soirée intime réussie, Jared Leto ayant compris et mis en pratique le concept : des anciennes compositions, des versions acoustiques et beaucoup d'interaction avec son public.

L'entrée de La Maroquinerie est un dépotoir : les fans hardcore ont dormi, mangé, bu, lu et joué là... Quel est l'intérêt d'une attente si longue quand la salle est si petite et qu'en arrivant à l'heure, on peut se placer au milieu, surélevé sur les marches en face de la scène (c'est-à-dire idéalement) ? Mystère. D'autant plus qu'une partie de ces fans passera le concert à parler, à filmer, à pouffer de rire ou à tenter de reprendre le flow de Kanye West sur une version acoustique de Hurricane... Pathétique.
Sans attendre la fin d'une quelconque première partie, le concert commence (après quelques notes de Closer de NIN) de bonne heure et de bonne humeur avec A Beautiful Lie et Attack, deux morceaux de l'excellent deuxième album. D'ailleurs, après avoir interprété son dernier single, Closer to the Edge, le groupe finira parfaitement la soirée par deux autres chansons de ce Beautiful Lie (2005), les entêtantes The Fantasy et The Kill (Bury Me) (impeccable), précédées d'une belle surprise : Battle of One (bonus track), rock'n'roll et sale. Un choix qui montre la volonté de 30 Seconds to Mars de privilégier les demandes du public plutôt que de faire la promotion de son dernier album, le remarquable This is War. Autre exemple : entre Search and Destroy et le merveilleux This is War malheureusement à peine chanté par Jared et suivi de 100 Suns, les quelques cinq cents personnes présentes ont eu la chance d'entendre un medley très appréciable de titres du premier album : Capricorn/Buddha for Mary/Oblivion. Une rareté que l'on ne risque plus d'entendre avant quelques années.
Finalement, la déception de la soirée se trouve peut-être dans le fait que Jared n'ait pas assez chanté et qu'on l'entendait faiblement quand il le faisait. Car, outre le plaisir d'entendre à nouveau A Modern Myth en live (en 2008 au Zénith de Paris, c'était en hommage à l'acteur Heith Ledger récemment décédé et ami proche de Jared), quand on constate la perfection de sa voix sur les versions acoustiques de cette chanson, Alibi (et son touchant trou de mémoire), Hurricane et les versions semi-acoustiques de Night of the Hunter et Kings and Queens, on se dit que les ingénieurs du son pourraient aider le chanteur quand le groupe est au complet et puissant, au lieu de mettre la batterie de Shannon (surdoué des fûts et cymbales) et les guitares en avant.

Une jolie surprise après avoir boycotté Bercy à cause de la mauvaise expérience du Zénith de Paris le 8 février 2008 (30STM n'a pas le public qu'il mérite). Hâte d'être à l'Olympia pour profiter du son acoustique légendaire de cette salle !

27/06/2011

Roger Waters @ Bercy, The Wall Live Tour, 31 mai 2011

Allez voir Roger Waters ou ne pas aller voir Roger Waters en concert ? Une question que l'on peut se poser avant l'événement, mais plus après. Alors, pourquoi avoir hésité ? Parce qu'on aurait voulu voir tous les Pink Floyd sur scène et que ce n'est plus possible (et que ça fait mal). Parce que c'est le Palais omnisport de Paris-Bercy et que l'enceinte n'est pas des plus chaleureuses, le son non plus d'ailleurs. Et parce qu'on a peur d'être déçu par ce qui procure plaisir (aux oreilles et aux yeux) et respect : The Wall. Mais Roger Waters, en plus d'être bassiste et chanteur, est l'auteur-compositeur de la quasi-totalité de ce concept-album mythique. Et, à l'instar de Paul McCartney le 10 décembre 2009 dans cette même salle et Roger Hodgson le 23 mai 2009 à l'Olympia, il a réussi, ce 31 mai 2011, à incarner l'âme de son groupe.

The Wall, c'est l'histoire de Pink, un rockeur qui se construit un mur dans sa tête pour se protéger du monde extérieur. Les vingt-six titres de ce double-album abordent de nombreux thèmes, notamment la peur, le nationalisme, le racisme, les guerres et la religion. Sur scène, le show est resté fidèle à la version originale de la tournée 1980-1981, mais a été adapté à l'actualité, surtout au niveau des images de guerre diffusées sur le mur de dix mètres de haut, que des techniciens érigent tout au long de la soirée. Parmi les animations : photographies poignantes, défilement de phrases écrites en plusieurs langues, vers grouillants, pluie de logos et extraits du film The Wall (1982).
Et le travail visuel ne s'arrête pas là : l'avion qui se fracasse sur le mur à la fin de l'ouverture, In the Flesh (effets pyrotechniques impressionnants inclus) ; les marionnettes géantes (la mère et l'instituteur de Another Brick in the Wall, composition culte) ; les drapeaux aux célèbres marteaux ; l'écran rond en fond de scène et le cochon gonflable noir de Run Like Hell volant au-dessus de la fosse, tout est réuni pour régaler les fans. Et si certains cinquantenaires en gradins se révèlent blasés et déçus (à croire qu'ils sont devenus aveugles et sourds), la minorité de jeunes pas si jeunes (entre 25 et 35 ans) réalise un rêve et mesure sa chance.
The Wall Live, c'est aussi une démonstration de technologie sonore approfondie. Le son des musiciens (dont le très applaudi Snowy White, guitariste présent en 1980) a été idéalement réglé, et les effets sonores spatialisés (légèrement trop forts) ont transcendé le public de Bercy. La réunion du plaisir des yeux et des oreilles s'est faite lors d'un clin d'œil à la tournée de 1981 : Roger Waters a interprété Mother avec lui-même, en chantant par dessus l'enregistrement d'époque (également projeté sur le mur). Un beau moment. Le seul véritable point négatif de la soirée, c'est l'entracte de plus de vingt minutes, justifié par le double album mais terriblement agaçant. Heureusement que Hey You relance la cérémonie floydienne menée de voix de maître par un Roger Waters épatant et heureux.

The Wall, une œuvre définitivement intemporelle.

22/06/2011

The Tree of Life - Terrence Malick

Si The Tree of Life de Terrence Malick ouvre des pistes de réflexion sans donner de réponses précises, on reste également sans voix à la fin du film. Est-ce du génie ou une perte de temps ? On peut croire s'être ennuyé de temps en temps, puis on prend conscience de la profondeur de ce long métrage mystique et cosmique, très attendu par les cinéphiles et récompensé d'une palme d'or au 64e Festival de Cannes.

La bande annonce, construite, accessible et prometteuse, ne reflète pas le rythme du film et son montage. Malick, cinéaste-philosophe traducteur de Heidegger, s'aventure dans son délire ontologique, et quand on pense qu'il ne peut aller plus loin, il prouve que si (jusqu'aux dinosaures en 3D...) et surprend les spectateurs, entre émerveillement et exaspération. Certains le suivent, d'autres non ; ces derniers prennent même le chemin de la sortie au bout de la première demi-heure.
Si The Tree of Life divise autant, c'est aussi parce qu'il est tout en équilibre et en tension. Jonglant entre infiniment grand et infiniment petit, le réalisateur remonte à la naissance de l'univers pour travailler le parallèle avec la construction de soi et montrer que tout se joue pendant l'enfance, sans laisser de côté la réalisation pure. Parce que le Cinéma, avant d'être un divertissement, est un art. Un art que Malick sert de moments extatiques et de ceux, plus intimes et psychologiques, vécus dans la cellule familiale ; tous sublimés par la photo somptueuse d'Emmanuel Lubezki, la musique remarquable d'Alexandre Desplat et les interprétations subtiles d'un Brad Pitt très crédible en père autoritaire, d'une inconnue parfaite (l'inverse est aussi vrai), Jessica Chastain, en mère protectrice, d'un trop rare Sean Penn, à la recherche de repères, et des enfants prodiges : Hunter McCracken, Laramie Eppler et Tye Sheridan.
Cependant, si l'on n'est pas sensible au style de Malick, et complètement hermétique à la métaphysique ou au souci du détail (attitude, regard...), il est absolument possible de ne pas adhérer à l'ambiance de The Tree of Life. De plus, la scène finale gâche un peu le traitement sérieux des idées liées à l'existence, la grâce et la nature. Cette réunion paradisiaque, symbole d'une paix retrouvée, dénote avec la puissance générale de l'ensemble. Enfin, l'on peut regretter les adresses trop nombreuses à Dieu, même si elles sont nécessaires quand on connaît l'attachement des États-Uniens à la religion.

The Tree of Life n'est ni le chef-d'œuvre espéré, ni l'échec décrit par certains critiques. C'est un ocni (objet cinématographique non identifié) qui fait déjà partie de l'histoire du Cinéma, et qu'il faudra revoir (en version longue de six heures ?).


Brad Pitt :
L'Étrange Histoire de Benjamin Button

Alexandre Desplat :
Le Discours d'un roi
Harry Potter et les Reliques de la Mort (Partie 1)
The Ghost Writer
Fantastic Mr. Fox
L'Étrange Histoire de Benjamin Button

21/06/2011

Minuit à Paris - Woody Allen

Contrairement à Cendrillon, c'est après les douze coups de minuit que Gil, écrivain en manque d'inspiration, se retrouve dans le Paris des années 1920 ; une faille temporelle que seul Woody Allen pouvait rendre aussi intime et attirante que fantastique et philosophique. Minuit à Paris a ouvert le 64e Festival de Cannes et enchanté les critiques et le public, à juste titre.

Alors oui, le Paris filmé par Woody Allen est un Paris idéalisé, vu par un étranger amoureux de la plus belle ville du monde ; et l'on ne peut s'empêcher de penser que la capitale a tout de même ses défauts, majoritairement issus de la société. Néanmoins, après l'introduction cartes postales sur fond de musique jazzy, servie par un beau travail de photographie, Allen se plonge dans les fantasmes de son héros (Owen Wilson ; voix dans Fantastic Mr. Fox), révélant les richesses artistiques et l'inspiration naissant à Paris, en contradiction avec la superficialité de la future femme de celui-ci, Inez, jouée par une Rachel McAdams (Sherlock Holmes) à claquer, donc douée.
Le choix du casting est en effet pour beaucoup dans la réussite de ce long métrage. Même si Carla Bruni est inutile et Gad Elmaleh juste drôle, Alison Pill (Scott Pilgrim) est follement pétillante en Zelda Fitzgerald, Kathy Bates est parfaite (comme toujours) en Gertrud Stein, Michael Sheen (Tron : Legacy) est insupportable de prétention et de pédantisme, et Marion Cotillard  (Les Petits Mouchoirs, Inception) est ravissante et douce. Les prix des meilleures interprétations reviennent à Tom Hiddleston (déjà brillant dans Thor cette année) en F. Scott Fitzgerald, et à Adrian Brody (voix dans Fantastic Mr. Fox), le plus incroyable des Dalí.
En assumant les clichés et en usant de la magie cinématographique, Allen réalise donc une jolie déclaration d'amour à Paris. Et au-delà de l'aspect bling-bling le jour et mystère la nuit, il justifie son propos en apportant une réflexion sur la nostalgie, le vide de l'existence et la recherche du bonheur. Qui n'a jamais pensé "c'était mieux avant" ?

On pensait Woody Allen coincé dans son style après Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu. Il réussit, avec Minuit à Paris, à redonner une certaine fraîcheur à sa filmographie.

16/06/2011

Thor - Kenneth Branagh

C'est le shakespearien Kenneth Branagh qui s'est attaqué à la réalisation de la dernière grosse production Marvel : Thor. Et c'est justement la spécialité du réalisateur qui a donné de la profondeur à ce film d'action plein d'humour mêlant monde mythologique et monde réel. Thor est un divertissement intelligent, qui n'omet pas les clins d'œil à l'univers Marvel, mais que la 3D assombrit fâcheusement. Attention cependant : long métrage à prendre avec du recul, pour profiter et ne pas tomber dans la critique négative facile !

S'il s'agit d'une adaptation issue des comic books Marvel, on a cependant affaire à un superhéros en devenir ; c'est là toute la subtilité. Nul besoin de s'attarder sur le pourquoi du comment Thor est si fort : c'est un dieu, un roi, arrogant et courageux. Branagh s'est donc penché sur la transformation psychologique du héros, et l'évolution des personnages en général, principalement au sein du drame familial.
Fils d'Odin, Thor a été banni du royaume d'Asgard pour avoir trahi son père en pénétrant dans le royaume ennemi, Jotunheim (monde des Géants de glace), afin de le détruire. Privé de ses pouvoirs et envoyé sur Terre, il fait l'expérience de l'impuissance et rencontre trois scientifiques, dont Jane, jouée par la talentueuse Natalie Portman (Sex Friends, Black Swan, Brothers, New York, I Love You), convaincante en amoureuse transie.
Mais côté casting, ce n'est ni elle, ni Chris Hemsworth, ni le toujours aussi mythique Antony Hopkins (Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu) qui captivent le plus. En interprétant un Loki (frère de Thor) tantôt innocent et résigné, tantôt méchant et révolté, Tom Hiddleston se pose en révélation divine. Il a donné tant de caractère et de relief à son personnage qu'on voudrait le voir encore (dans The Avengers ?).

La scène postgénérique fait évidemment référence aux Avengers de Joss Whedon, de la même manière que dans Iron Man 2 un teaser annonçait Thor.

15/06/2011

Beginners - Mike Mills

Mike Mills est un cinéaste, graphiste, qui a réalisé de nombreux clips vidéo (notamment pour Air, Moby ou Yoko Ono), des publicités (Levi's, Volkswagen, etc.) des courts métrages, des documentaires et des longs métrages (Âge Difficile Obscur, son premier film sorti en 2005, a gagné plusieurs prix aux festivals de Sundance et de Berlin). Il a également conçu des pochettes d'albums (pour Sonic Youth et les Beastie Boys, par exemple) et a travaillé pour des marques comme Marc Jacobs.

Si l'on s'attarde autant sur le réalisateur de Beginners, c'est qu'il a mis beaucoup de lui dans son film. Le personnage principal, Oliver, joué par le toujours très bon Ewan Mc Gregor (Les Chèvres du Pentagone, I Love You Philip Morris, The Ghost Writer), lui ressemble : il est illustrateur (les dessins sont de Mike), il a également perdu sa mère et vécu ensuite  le coming out de son père de 75 ans mort à 80 ans, magnifiquement interprété par Christopher Plummer (L'Imaginarium du Docteur Parnassus, Syriana).
Hormis la relation père/fils donnant naissance à quelques scènes d'une beauté délicate et touchante, Mike Mills a imaginé l'histoire d'amour d'Olivier et Anna. Mais après une jolie première rencontre muette, idéale pour le jeu de Mélanie Laurent (La Rafle), les idées sont mal exploitées et le film ne trouve pas son équilibre entre un chien philosophe qui parle (sous-titrage), des flashbacks, une voix off, des cartes postales en guise de repères historiques... De plus, le personnage d'amant gay trop caricatural — Goran Visnjic (vu dans un segment de New York, I Love You, mais surtout dans la série Urgences : Dr Luka Kovac) — fait partie des détails qui peuvent éloigner le spectateur du film.
Et pourquoi Beginners  ? Parce que les êtres humains recommencent toujours : une relation, un travail, une dépression, un deuil... La moralité, c'est que la vie est un éternel apprentissage et qu'il ne faut jamais renoncer, la reconstruction étant possible. Pourquoi pas. D'ailleurs, sur ce thème et celui de la solitude, Mills n'a rien à envier à Sofia Coppola et son décevant Somewhere. Mais la fin trop optimiste de Beginners n'est pas tout à fait cohérente avec ce qu'on a vu de la relation amoureuse.

Un film trop léger malgré des qualités indéniables. Dommage.

01/06/2011

Rango - Gore Verbinski

Après Megamind des studios Dreamworks, Rango, c'est le nouvel antihéros qui donne son nom à un film de la société de production Paramount. Mais cette fois, c'est Gore Verbinski (réalisateur des Pirates de Caraïbes 1, 2 et 3) qui se penche sur l'animation. Il livre l'un des dessins animés les plus intéressants, délirants et piquants de ces dernières années.

Rango est un caméléon solitaire, tant dans son terrarium que dans l'immensité du désert Mojave. Mais l'eau se fait rare dans ce dernier, et les habitants de la ville de Dirt en manque cruellement. Imposteur au grand cœur, Rango s'invente une vie héroïque et fait une promesse : trouver l'or bleu.
Mais derrière cette quête, derrière cette parodie fine et réussie des westerns spaghettis, se cache un enjeu plus intime : la recherche d'une identité. Rango ne sait pas qui il est, et c'est lui qu'il va trouver à la fin de ce parcours initiatique ; raison pour laquelle on s'attache si vite à ce caméléon (décidément, après Pascal dans Raiponce...).
La voix de Rango, c'est celle d'un Johnny Depp (Alice au pays des merveilles) toujours aussi brillant ; l'année dernière, il prêtait sa voix au documentaire sur les Doors : When You're  Strange. La musique de Rango, c'est celle d'Hans Zimmer, tout en hommage au genre. Quant aux décors magnifiques, ils participent à la création d'un univers coloré, unique et techniquement précis. Enfin, le rythme est parfois lent, mais l'humour toujours vif et décalé, à la limite de l'absurde. C'est pourquoi les grands enfants s'y retrouvent probablement plus que les petits.

On ressort assoiffé de ce voyage !