27/02/2011

Black Swan - Darren Aronofsky

Natalie Portman n'est toujours pas remise de son rôle de jeune ballerine sombrant peu à peu dans la psychose. Et moi je ne suis toujours pas remise de ce film noir fascinant, le dernier film de Darren Aronofsky : Black Swan. Deux semaines et demie. Deux semaines et demie que les mots ne viennent pas, qu'ils se bousculent pour être choisis : perturbant, captivant, sublime, angoissant, déstabilisant, fantastique, étourdissant, brillant, fou...

Darren Aronofsky s'est penché sur les problématiques du monde de la danse classique, et plus particulièrement sur la recherche de l'excellence et les sacrifices à faire pour y parvenir. Il est alors tombé dans un monde d'obsessions, de dépassement de soi, de douleurs et de violences corporelles et mentales, qu'il a poussé jusqu'à la schizophrénie en se concentrant sur l'expérience d'une nouvelle soliste perfectionniste et fragile, privée lors des répétitions du corps de ballet. Un statut suscitant jalousie et donnant naissance à une compétition réelle mais aussi à des rivalités fantasmées.

Nina prépare les deux rôles principaux du Lac des cygnes. Pour cela, elle est obligée de passer par une métamorphose. Car, si elle est la danseuse idéale pour le rôle du cygne blanc grâce à sa technique et sa finesse d'interprétation, elle doit travailler à se libérer pour pouvoir exprimer la passion sauvage du cygne noir, un sentiment qu'elle ne connaît pas. Cette dualité se projette inévitablement sur l'autre : Lily, jolie danseuse pour qui le rôle semble naturel. Et la mise en abîme du Lac des cygnes ne se limite pas à la figure délicate et au double sombre, mais montre également le maître de ballet, Thomas Leroy, assimilé à l'inquiétant Rothbart. Progressivement, Nina est de moins en moins timide, de moins en moins rigide : elle s'affirme, et passe de l'enfance à l'âge adulte (non sans brutalité et instabilité) ; on est clairement dans le film d'apprentissage, le conte de danseuses.
Cette descente aux enfers liée à une quête de la perfection (que l'on retrouve chez le réalisateur lui-même) donne lieu à une variation de genre. On bascule du docu-fiction sur l'univers du ballet vers un film d'épouvante. Et si on ne cesse de lire que Black Swan est un thriller psychologique, c'est aussi un exercice de style. C'est un long métrage puissant, qui traite certains archétypes avec autant de réalisme que de poésie. Et tout est maîtrisé : l'intrigue, les décors, la mise en scène, la photographie, et la musique, de Clint Mansell, se mariant à merveille à celle de Tchaïkovski.
Évidemment, outre les interprétations réussies de Mila Kunis (Jackie dans That's 70's Show), Vincent Cassel et Winona Ryder, c'est Natalie Portman (New York, I Love You, Brothers, Hotel Chevalier) que l'on remarque le plus, par une performance époustouflante. Elle est sidérante. La majorité des spectateurs semblent la découvrir enfin, alors que c'est une actrice virtuose depuis Léon (Garden State, Closer, V pour Vendetta, Les Fantômes de Goya...). Elle a toujours bien choisi ses rôles et s'est préparée avant d'en accepter un aussi dangereux et viscéral que celui de Nina, danseuse étoile tourmentée du New York City Ballet.

Le seul point faible de Black Swan, c'est qu'on aurait aimé qu'il ne fasse pas partie de la culture de masse. Tant de créativité artistique gâchée par des bruits de pop-corn, des discussions bruyantes, des réactions inappropriées et autres comportements irrespectueux, c'est pitoyable. Black Swan est un long métrage tendu et rythmé, qui ne relâche jamais la pression, et dont on ressort épuisé. Alors oui, les touristes du cinéma qui viennent se divertir pour tenter de briller en société, c'est pénible.

Pour terminer sur une note positive : à un moment, le maître de ballet dit qu'un artiste n'est rien s'il n'a pas de vie en lui ; Natalie Portman déborde de vie jusqu'à nous en insuffler le temps du film.

2 commentaires:

  1. Merci ma Lola pour cette critique qui retranscrit exactement ce que j'ai ressenti en voyant Black Swan! Ca fait 2 semaines et demi que je conseille a tout le monde d'aller le voir et surtout que je ne m'en remets toujours pas...
    Il faut aussi saluer la performance de Barbara Hershey en "overbearing mother".

    Djéné.

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  2. Moi j'en ai un, de mot : nul.

    C'était mauvais.

    Pour moi, Aronofsky a réunis tous les ingrédients pour un bon film, et a laissé le tout cramer dans la poelle. Du gâchis.

    Nous avons donc : des acteurs fabuleux, un sujet parfait, de la folie, et une BO magnifique de bout en bout.
    Résultat : à part quelques scènes, on reste sur sa fin. Faire noir, faire glauque, faire trash, c'est facile. La photo n'est pas terrible, la danse est filmée à faire vomir même les fans de Space Mountain (pour rajouter du piqué aux tours de Nathalie Portman ?), l'histoire se perd dans le pseudo-étouffant à en devenir chiant.

    Alors oui, la danse classique est un monde difficile, on est au courant. Mais il y avait de quoi faire un grand film avec ces ingrédients, peut-être en laissant plus de place à Lily et en la faisant exister plus, en apportant un peu de lumière pour mieux faire ressortir toute cette noirceur. Pas en passant d'une control freak à une folle furieuse schizophrène.
    Car on se demande : quel est le message de ce film ? "Reste control freak ou tu vas finir folle, en passant par une boîte aux activités répréhensible" ? Absurde.

    Black Swan n'est pas beau (ou rarement), il n'est pas bien. Il reste bon à écouter – c'est assez maigre pour un film annoncé partout comme mirifique.

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De la critique positive et négative, oui ! Mais toujours construite et justifiée, merci !

L.