31/12/2010

Sélection des 10 meilleurs concerts de 2010

La fréquentation des salles de concert cette année a été moins assidue que l'an dernier, comme annoncé dans la sélection des 10 meilleurs concerts de 2009.
Si l'envie et les émotions se font plus rares, notamment à cause du public, ces dix concerts ont été de véritables moments de bonheur.



Bonus !
Connues ou moins connues, ce sont des valeurs sûres en live.


L'année 2011 ne sera pas plus dédiée aux concerts, voire moins, mais si le cru est de cette qualité, ce sera un plaisir.

30/12/2010

Megamind - Tom McGrath

Après le Raiponce de Disney, on enchaîne avec un autre dessin animé (en cette période de fin d'année, qui ne retombe pas en enfance ?) : Megamind des studios Dreamworks. Un petit moment de détente intelligente.

Megamind est né avec l'envie de faire le bien, mais Megamind ne sait bien faire que le mal. Il devient alors un superméchant et ne cesse de se battre contre le défenseur de Metrocity, Metroman, son adversaire depuis toujours. Il est accompagné de Nounou, un piranha attendrissant dans un corps robotique.
Dès le début, on sait que Megamind a un fond gentil, et qu'il a choisi la voie de la méchanceté ; on attend donc le retournement de situation, comme pour Gru dans Moi, moche et méchant. À croire qu'on ne verra jamais de méchant animé triompher.
Servi par une bande son rock'n'roll (avec AC/DC et en partie signée Hans Zimmer), le scénario est inventif et heureusement soutenu par le héros principal. Car, même si Metroman est agaçant de perfection, Titan diaboliquement bête et la journaliste Roxanne Ritchie antipathique (utilisant parfois un vocabulaire gâchant la finesse du film), c'est bien le bleu Megamind que l'on suit des yeux !
 
Tom McGrath réalise un film drôle, dont la 3D est efficace ; Dreamworks est cependant loin de son Dragons.

27/12/2010

Raiponce - Byron Howard & Nathan Greno

Depuis plusieurs années, le traditionnel Disney perd nombre de spectateurs, lesquels préfèrent aller voir les productions en images de synthèse de Pixar, Dreamworks et autres. Pourtant, la relecture moins sombre du conte des frères Grimm, Raiponce, c'est l'œuvre des studios Disney. La renaissance des pionniers viendrait-elle avec ce très bon film ?

En début d'année, sortait La Princesse et la Grenouille, un dessin animé signé Disney qui renouait avec le charme d'antan tout en modernité, mais qui manquait cruellement de cette magie subtile faisant la gloire des studios. Ce mois-ci, Raiponce, une jolie jeune fille à la longue chevelure magique, illumine les salles obscures accompagnée de son fidèle caméléon, Pascal, l'un des plus attachants personnages secondaires de toute l'histoire de Disney.
Malgré des chansons moyennes qui n'entreront pas dans la légende, et une scène d'exposition trop longue, Raiponce est un conte de fées classique mais percutant ; une romance solide, drôle et rythmée, qui ne tombe jamais dans la niaiserie. Et en compilant les références (une princesse qui ne sais pas qu'elle en est une, comme dans La Belle au bois dormant ; un prince des voleurs qui rêve d'une vie de château, comme dans Aladdin ; ou encore la scène de la barque, qui ressemble à celle de La Petite Sirène), force est de constater que Disney veut revenir au sommet.
Néanmoins, cette volonté de bien faire tombe dans l'excès avec le choix de la 3D. En effet, Byron Howard et Nathan Greno ont tout fait pour que Raiponce soit un chef-d'œuvre, mais cette technique, qui dans certains films pallie une insuffisance de travail sur le fond, était inutile, voire même de trop.

Disney est sur le bon chemin !

22/12/2010

White Lies, I Like Trains & The Vaccines @ La Flèche d'Or, Inrocks Indie Club

Le 17 décembre 2010 à La Flèche d'Or, c'était une soirée de premières fois pour les trois groupes de rock anglais qui jouaient lors de la dernière soirée Inrocks Indie Club de l'année. The Vaccines donnait son premier concert en France, I Like Trains remontait pour la première fois sur scène depuis la guérison de son batteur, et White Lies, trio devenu quintette en live, interprétait ses morceaux dans cette configuration pour la première fois en France.

The Vaccines
Reviendrait-on au rock anglais efficace et sale ? Le groupe inconnu pour la grande majorité du public propose des chansons courtes et immédiates, sans prise de tête ni accoutrements fashion. The Vaccines, c'est un chanteur volontaire, un bassiste amorphe, un guitariste lobotomisé qui scrute le fond de la salle, et un batteur complètement investi, transcendé dès la première chanson comme si c'était la fin du concert, et ce malgré (ou peut-être est-ce la cause d'un tel déchaînement) un état de sobriété douteux. Tout n'est pas excellent, mais c'est une jeune formation à suivre de près, avec, pour commencer, la sortie de leur premier album en mars prochain.

I Like Trains
On reste dans le rock, mais on change radicalement d'ambiance avec I Like Trains. Et hormis quelques quarantenaires (cinquantenaires ?) qui pensent retrouver leur jeunesse dans la bière, et qu'il faut faire taire pour profiter de la musique car ils n'y comprennent rien, une partie de l'audience est polie, l'autre absorbée. Il faut dire que ce groupe post-rock originaire de Leeds impose le respect. Ils transpirent le professionnalisme, ont une attitude posée mais savent se lâcher quand c'est nécessaire. En live, leur musique prend une dimension plus intense, profonde et puissante que sur album, même si la voix reste discrète. Le groupe offre un final impressionnant, progressif et apocalyptique avec un morceau de dix minutes : Spencer Perceval. À revoir sans hésiter pour un concert plus long !

White Lies
En attendant White Lies, on peut se demander pourquoi l'individu qui accorde la guitare de Harry s'y attarde à plusieurs reprises, et surtout, on peut râler sur le changement de setlist effectué à la dernière minute : ils suppriment l'excellente From the Stars pour ajouter une chanson de leur deuxième album prévu pour janvier, Streetlights. Ils auraient franchement pu ajouter la nouvelle sans supprimer l'ancienne...
Quatuor lors de leur prestation en première partie de Muse le 12 juin au Stade de France, WL s'agrandit encore pour former un quintette. Il y a donc certes plus de musiciens, mais ils n'ajoutent rien de plus intéressant que ce que faisait le trio à ses débuts (en 2009 à Montréal, par exemple...). D'ailleurs, même si le groupe est là pour commencer la promotion de Ritual, il s'assure que le public trouve ses repères en ouvrant le concert sur A Place to Hide et en le clôturant sur Death, chansons de leur premier album To Lose My Life. Entre-temps, on chante et on saute sur To Lose My Life, Bigger than Us (le nouveau single), E.S.T. et Unfinished Business, et on découvre Holy Ghost, Peace & Quiet, Strangers et Streetlights. Ces dernières sont malheureusement trop soulignées par des synthétiseurs superflus. Un peu, c'est agréable (notamment sur Bigger than Us), mais la présence des synthés sur toutes les nouvelles chansons, c'est décevant : on tombe dans des répétitions d'ambiances, même si cela reste de bonne qualité.
L'ensemble de la prestation se révèle donc tout de même plus sérieux que leur passage à l'Élysée Montmartre le 28 octobre 2009, l'interprétation des compositions étant plus travaillée, plus sombre, plus juste, comme la voix de Harry. De plus, Charles, le bassiste et compositeur, vit pour sa musique et transmet au public son amour pour elle, et Jack, le batteur, est tout simplement parfait. WL gâche son entrée de rappel avec le son synthétique ruinant la mélodie d'introduction de Farewell to the Fairground, qui se termine toutefois parfaitement. Puis, les Anglais proposent un nouveau morceau prometteur, Power & Glory, avant d'offrir Death à une Flèche d'Or comblée. White Lies est un très grand groupe qui doit confirmer son statut avec son deuxième album prévu pour le 17 janvier. On a hâte d'entendre l'intégralité de Ritual en studio !

La dernière soirée Inrocks Indie Club de l'année était aussi le dernier concert de 2010 pour CotNS. Une soirée bien plus équilibrée que celle des Inrocks Indie Club du 23 juin dernier à La Maroquinerie, avec des performances qui prouvent que l'on peut encore être surpris et touché en live.

20/12/2010

Sound of Noise - Ola Simonsson & Johannes Stjärne Nilsson

Sound of Noise, c'est la version longue de Music for one appartment and six drummers, court métrage époustouflant de 2001 mettant en images un concert de percussionnistes en quatre mouvements : Cuisine, Chambre, Salle de bains et Salon. Avec leur premier long métrage, les réalisateurs suédois Ola Simonsson et Johannes Stjärne Nilsson imposent un style déjanté, original, décalé, libre, déconcertant, fou, délirant, frappé, dément... Bref, complètement "barré".
 
Amadeus Warnebring (Bengt Nilsson) est né dans une illustre famille de musiciens. Son prénom le prédestinait à une grande carrière musicale, comme son petit frère devenu célèbre chef d'orchestre, mais Amadeus est allergique à la musique. Il la déteste. Pourtant, celle-ci va la rattraper jusque dans son métier, policier. Car Amadeus doit se lancer à la poursuite de terroristes musicaux qui sévissent dans la ville : six percussionnistes souhaitent réaliser un concert en quatre mouvements ; d'abord dans un hôpital, puis dans une banque, devant un auditorium ensuite et finalement dans une centrale électrique.
Rythmé par un métronome jouant avec les nerfs de l'inspecteur Warnebring, Sound of Noise est un film sérieux mais plein d'humour, qui véhicule des idées anarchistes en présentant un travail expérimental sur les sons. La recherche sonore est impressionnante et les Six Drummers font preuve d'une rare ouverture d'esprit en détournant avec talent des objets du quotidien. On pourrait cependant reprocher à ces chirurgiens du son de faire la guerre à la musique classique, laquelle endosse injustement le mauvais rôle.
Au-delà de la prédominance des bruits musicaux, et même des silences, l'image est éclatante. Le travail de la directrice de la photo, Charlotta Tengroth, est remarquable, et la réalisation est proprement travaillée. Sound of Noise, c'est plus qu'un film, c'est un concept artistique génial, une œuvre musicale visible, un OFNI (objet filmé non identifié). Ce n'est pas une comédie musicale, c'est un drôle de film sur la musique, à voir en version originale pour profiter de la musicalité de la langue suédoise, ajoutant un peu plus d'absurdité à la chose.

La seule fausse note : une fin un peu faible...

17/12/2010

Scott Pilgrim - Edgar Wright

Un phénomène pour fêter la première année de Curse of the Ninth Symphony.

Scott Pilgrim, c'est le héros éponyme d'un excellent comic book canadien, né du brillant esprit de Bryan Lee O'Malley. Les six volumes, un concentré de culture pop et geek, ont été adaptés par Edgar Wright. Le réalisateur signe un très bon film culte, visuellement maîtrisé, et écrit ainsi que monté sur le modèle de la bande dessinée : dialogues vifs, transitions brutales et, détail propre à Scott Pilgrim, incorporation des éléments du jeu vidéo (aussi bien visuels qu'auditifs).

Scott doit affronter et vaincre les sept ex-petits amis maléfiques de Ramona pour être avec elle. Dit comme ça, ce n'est pas très palpitant. Mais passer à côté du comic book comme du film serait une grosse erreur ! Car Scott Pilgrim, c'est drôle, rythmé et générationnel. Et dès la première seconde de la bobine du film (légèrement abîmée, à croire que Scott Pilgrim est décidément maltraité en France : sortie tardive au cinéma, à l'affiche dans soixante-quatre salles en France, quatre à Paris, et durée ultra-limitée), on entre dans l'univers Scott Pilgrim. Le ton est donné par un logo Universal pixelisé accompagné du célèbre thème en version 8-bit ; on ne peut s'empêcher d'esquisser un sourire.
Pour filmer Toronto (les lieux du comic book existent vraiment), les Sex Bob-omb (groupe de rock dans lequel joue Scott) et les combats de superpouvoirs à la fin desquels le perdant se désagrège en pièces de monnaie, Edgar Wright s'est entouré, entre autres, de Bill Pope (directeur photo de la trilogie Matrix) à l'image et de Nigel Godrich (producteur de Radiohead) pour la musique originale ; pas n'importe qui, donc. Côté casting, Michael Cera (Juno, Une Nuit à New York) interprète brillamment Scott ; Mary Elizabeth Winstead (Boulevard de la mort) est juste, mais a parfois le regard vide comparé à la magique Ramona fictive ; Alison Pill (Milk) est étonnante en batteuse, même si on ne la voit que peu ; Jason Schwartzman (voix dans Fantastic Mr. Fox cette année) est parfait en Gideon ; mais Anna Kendricks (In the Air), qui joue Stacey, la sœur de Scott, est censée avoir moins de 20 ans et ses 25 la trahissent. Certains visages connus de séries sont présents, comme Brandon Routh (Chuck) et Brie Larson (United States of Tara), laquelle avait le potentiel d'être bien plus belle dans son rôle de Envy. Pourquoi n'a-t-il pas été exploité ?
Au-delà de minimes erreurs dans le choix des acteurs (on se fait toujours sa propre idée des personnages, même quand ils sont dessinés), la seule chose que l'on peut regretter, c'est que les six volumes sont condensés en un film. Car, malgré la réussite, certains détails ont été évincés ou modifiés, et le plaisir demeure trop court ! La clé du plaisir est donnée par une réplique apparemment anodine, entendue au détour d'une conversation... Dans le comic book, les personnages s'adressent parfois au lecteur et prennent conscience qu'ils font partie d'une histoire découpée en volumes. Cette capacité autoréflexive trouble le lecteur qui peut se laisser aller à imaginer une réalité Scott Pilgrim. Ce rapport à la réalité existe aussi dans le film : l'un des personnages dit rapidement, en plein milieu d'une séquence d'action, que les BD sont mieux que le film. Une réplique qui passe presque inaperçue, mais que l'on peut aussi appliquer à la réalité. Et le film est "awesome", alors comment peuvent être définis les livres ?!

Name : Scott Pilgrim ; Age : a few years (it's a comic book and a movie, dude !) ; Rated : an epic of epic epicness

08/12/2010

Machete - Robert Rodriguez

À peine sorti en salle, Machete était déjà culte grâce au teaser. Confirmation avec ce long métrage aussi drôle que violent, digne du réalisateur, scénariste, monteur et producteur Robert Rodriguez (Sin City, Planète Terreur). Machete, à l'origine, c'était une fausse bande-annonce qui ouvrait Planète Terreur. Rodriguez en a fait un film Grindhouse.

Machete, c'est l'histoire d'un homme qui se bat. Mais contrairement à celle de Biutiful, elle est extravagante et filmée sous un angle vintage et parodique. Et si Danny Trejo porte le film, les seconds rôles n'en sont pas moins délectables, avec les bombes Jessica Alba (The Killer Inside Me), Michelle Rodriguez et Lindsay Lohan, et un Robert De Niro en politicien raciste et conservateur.
Machete, c'est cinq tonnes d'action et d'explosion, quelques scènes ultrasexy, beaucoup de sang et d'images gores, une réalisation, un montage et une photo travaillés, sublimés par une bande-son énergique, et des dizaines de répliques aussi ridicules que cultes ("Machete don't text.", "I thought Machete don't text !/Machete improvise.", "Machete sent me a text./What did it say ?/'You just fucked with the wrong Mexican.'").
Machete, c'est simplement un excellent Robert Rodriguez. Un film hommage aux séries B qui explose tout sur son passage, en puisant sa puissance dans la médiocrité.

Machete, c'est bientôt Machete Kills et Machete Kills Again. Mythique.

07/12/2010

Biutiful - Alejandro González Iñárritu

Biutiful n'est pas un mauvais film, mais le réalisateur, scénariste et producteur, Alejandro González Iñárritu, aurait pu mieux faire. Iñárritu, qui a aussi produit Mother and Child cette année, c'est celui qui a offert au cinéma Amours Chiennes, 21 Grammes et Babel. Mais avec ce long métrage, qu'il a coproduit avec les réalisateurs Alfonso Cuarón et Guillermo del Toro, il signe un drame intimiste bien trop misérabiliste.

C'est l'histoire d'un homme, de sa vie, de ses angoisses... Et c'est déjà perturbant quand on a l'habitude des destins croisés scénarisés par Guillermo Arriaga. Mais Iñárritu s'est séparé de ce dernier, et livre une succession étouffante de malheurs liés à la mort, dans une ville sordide habituellement représentée comme festive : Barcelone.
Hormis une scène bouleversante entre un père et sa fille réaliste, et une autre touchante et étrange entre un fils et le cadavre plutôt bien conservé de son père (mort plus jeune que lui), le film, porté par Javier Bardem (prix d'interprétation masculine au festival de Cannes), en fait trop.
L'ensemble aurait mérité des coupes, pour ne pas emprisonner le spectateur dans une triste et lourde fièvre approchant les deux heures et demie. On finirait presque par ne plus être touché, insensible à cette montagne de séquences funestes.

Biutiful conserve une certaine saveur grâce à la langue espagnole qui réchauffe ce film dénué d'espoir.

06/12/2010

Red - Robert Schwentke


Red, de Robert Schwentke, est un film sans prétention qui donne ce qu'il promettait : de l'humour, de la détente et de la qualité. Drôle, délirant et récréatif, tant pour les acteurs que pour les spectateurs, ce long métrage est efficace si l'envie prend certains de s'amuser un peu dans une salle obscure.


D'abord, Red est un exercice de style maîtrisé. On plonge dans une ambiance d'entre-deux mêlant action et comédie. On a sa dose de cascades et d'effets spéciaux, très justement mesurée pour être bluffé et rire en même temps. Le réalisateur ne dépasse jamais la limite qui le ferait tomber dans le kitsch pathétique.
Le choix des acteurs est aussi pour beaucoup dans cette simple réussite. Bruce Willis, Morgan Freeman, John Malkovich et Helen Mirren, ces grands du cinéma à la filmographie bien remplie sont humbles et toujours aussi talentueux, tout en ayant l'air de prendre du plaisir à jouer les "retraités extrêmement dangereux" de la CIA. John Malkovich tout particulièrement, et Morgan Freeman (Invictus), qui en impose toujours autant.
Enfin, dans ce film jamais trop sérieux mais pas dénué de sens pour autant, Karl Urban endosse très bien le costume de l'ambitieux agent de la CIA. On ne réfléchit pas et on se laisse aller...

"I'm getting the pig !"

30/11/2010

Harry Potter et les Reliques de la Mort (Partie 1) - David Yates

Quels sont les films qui vous donnent le sourire dès les premières secondes ? Ceux qui vous font entrer dans leur univers avant même qu'ils ne commencent, juste grâce à quelques notes de musiques familières et le logo revisité de l'une des plus grosses sociétés de production et de distribution ? Les films de la saga Harry Potter.


Et peu importe la qualité cinématographique quand on retrouve les personnages de ce monde imaginaire dans lequel on voudrait vivre depuis une dizaine d'année. Mais avec cette première partie du septième volet, Harry Potter et les Reliques de la Mort, David Yates offre un film travaillé, sombre, tendu et passionnant, loin du précédent : Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé. Fini le montage brouillon et les scènes mielleuses d'adolescents : le réalisateur s'est enfin replongé dans le monde magique mais aussi réaliste du sorcier.

Confronté à de multiples drames qui l'éloignent de l'enfance, Harry (Daniel Radcliffe) évolue en dehors de l'enceinte de Poudlard, en compagnie d'Hermione (Emma Watson) et de Ron (Rupert Grint, vu cette année dans Petits meurtres à l'anglaise de Jonathan Lynn). Sans protection, ils se retrouvent face à eux-mêmes et à leurs doutes ; Hermione a lancé un sortilège à ses parents pour qu'ils l'effacent de leur mémoire (la brièveté de la scène n'a d'égal que son intensité), Ron est séparé de sa famille, et Harry a bien du mal à se remettre de la mort de Dumbledore. Yates a donc choisi de ne pas aborder les révoltes des élèves à Poudlard, sans doute pour laisser exploser l'action générale dans la deuxième partie, annoncée par un terrible "Losers !" lancé par Neville aux Rafleurs dans le Poudlard Express. Le réalisateur peut ainsi s'attarder sur des séquences importantes et creuser au plus profond des personnages ; ce que permet la scission de ce dernier volet en deux parties. Il peut prendre le temps de préparer la fin, et, en même temps, de préparer le fan à la bataille ultime qui symbolise la fin de la saga.
Avec cette première partie, le spectateur se détache progressivement de l'univers enchanteur et merveilleux des couloirs de Poudlard. Et si à la lecture du livre on regrettait l'absence des trois amis à l'école (surtout parce qu'on ne voulait pas sortir de cette bulle ensorcelée), on réalisait également combien la décision de Harry était mature, responsable et nécessaire. D'autre part, le climat de guerre et de chasse aux sorciers nés de parents Moldus renvoie le spectateur à une époque pas si lointaine, quand Hitler imposait à l'Europe sa volonté d'exterminer les individus au sang impur selon lui (l'insulte "Sang-de-Bourbe" est cruellement gravée par Bellatrix sur l'avant-bras d'Hermione). On pourrait même étendre la comparaison à aujourd'hui, mais cela entraînerait une trop longue digression socio-politique qui n'a pas sa place dans une critique de cinéma. La suggestion est assez claire, retour au film !
Mélancolique, captivant, ténébreux, lent, surprenant, grave... On est en droit de se poser cette question : Harry Potter et les Reliques de la Mort, Partie 1 est-il filmé par le même réalisateur que celui de l'épisode six ? Certes, Yates est aidé par un livre écrit presque comme un scénario, par des décors noirs, par des paysages aussi vastes qu'inquiétants, par des seconds rôles (Helena Bonham Carter (Alice au pays des merveilles), Alan Rickman, Ralph Fiennes, Dobby...) tous plus brillants les uns que les autres et par une partition signée du très bon français Alexandre Desplat (récemment entendu dans Fantastic Mr Fox de Wes Anderson), mais le réalisateur dévoile une facette plus intelligente dans le traitement soigné du rythme, du ton et de l'émotion plus que de l'action.

Voldemort a fragmenté son âme pour être immortel. Harry, Ron et Hermione sont donc à la recherche des Horcruxes pour les détruire. Mais dans cette quête, les trois jeunes adultes découvrent l'existence des Reliques de la Mort : la Baguette de Sureau, la Pierre de Résurrection et la Cape d'Invisibilité. Et cette sérendipité donne lieu à une séquence d'animation elliptique et audacieuse pour illustrer Le Conte des trois frères. Une idée originale.


La menace va se transformer en apocalypse, et on a hâte de voir ça !

29/11/2010

Mother and Child - Rodrigo García

Destins croisés pour ce film de Rodrigo García produit par Alejandro González Iñárritu. Malheureusement, dix ans après Ce que je sais d'elle... d'un simple regard, le réalisateur, fils de l'écrivain Gabriel García Márquez, n'apporte rien de nouveau à sa façon de filmer les femmes. Encore un long métrage aux histoires entremêlées, mais celui-ci sent le réchauffé.

En effet, malgré un montage correct, la mise en scène est moyenne et le scénario attendu. Rien ne surprend le spectateur : on attend simplement que les scènes arrivent, avec leur lot de clichés sentimentalo-familiaux. Et pour ne rien arranger, la musique trop présente est vraiment médiocre.
Heureusement, Samuel L. Jackson fait bien son travail, et les trois portraits de femmes sont relativement bien joués. Trois femmes pour trois performances différentes. D'abord, la moins bonne : Annette Bening. Elle a pris un sacré coup de vieux, mais celui-ci lui sert finalement pour son interprétation de femme détruite dans son adolescence et jamais remise de ses blessures. Ensuite, si la merveilleuse Naomi Watts (récemment vue dans Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu de Woody Allen) joue habilement son rôle, il faut avouer que c'est Kerry Washington qui crève l'écran en proposant un jeu aussi puissant que touchant. Elle est sublime.
Mais Mother and Child reste un film sur la maternité manquant de profondeur, et tombant dans la mièvrerie et le pathétique avec certaines répliques lourdement répétées telles que : "C'est le temps passé ensemble qui compte et non le sang." Qui a dit "moralisme" ?

Un film convenu qui ravira les moins exigeants.

24/11/2010

Les Petits Mouchoirs - Guillaume Canet

Les petits mouchoirs, ces voiles que l'on pose sur certains défauts ou sur des vérités difficiles à entendre pour ne pas faire de mal à autrui ou à soi-même, ces mensonges blancs, Guillaume Canet les filme avec authenticité et justesse. Après Mon Idole et la confirmation de son statut de très bon réalisateur avec Ne le dis à personne (l'adaptation du livre de Harlan Coben), son troisième long métrage prouve qu'en changeant de style, il ne perd pas de son talent.

Les Petits Mouchoirs, c'est un film sur les ambiguïtés et les compromis d'une bande de copains ; sur l'amitié, tout simplement. C'est un film empreint de mélancolie, un tourbillon d'émotions dont on sort lessivé. C'est un film générationnel, ponctué de phrases cultes. On pleure beaucoup, de rire, parfois jusqu'à se faire mal aux muscles abdominaux (la scène de Marion Cotillard dans l'eau est mémorable), et de tristesse, jusqu'aux sanglots.
Les deux heures et demi, qui pourraient en rebuter plus d'un, passent aisément grâce à la sensibilité cinématographique de Canet et à son regard acéré et profond sur les personnages. Il ne leur trouve jamais d'excuses, et n'en épargne pas un seul. Cela permet aux acteurs de s'exprimer, de prendre vie sans se faire d'ombre. Évidemment, même si le casting presque parfait montre un groupe soudé, certains se démarquent. Benoît Magimel (Vincent) n'a pas été aussi bon depuis longtemps, Marion Cotillard (Marie), récemment vue dans Inception, est définitivement l'une des meilleures actrices de sa génération, François Cluzet (Max) est magistral, comme d'habitude, et le couple qu'il forme (comme à la ville) avec Valérie Bonnetton (Véronique) est d'une justesse rarement filmée. Enfin, Joël Dupuch (Jean-Louis) hérite judicieusement du plus beau rôle.
Un seul regret : le matraquage promotionnel qui ouvre grand la porte aux critiques voulant cracher leur venin sur le réalisateur comme sur son film. L'un des arguments qui reviennent souvent, c'est l'absence d'un scénario pointu. Mais pourquoi toujours encenser les films à scénarios complexes et déprécier les autres ? Il faut savoir apprécier les films simples et très bien réalisés, qui ne sont pas forcément des leçons de cinéma. Les Petits Mouchoirs, c'est le récit d'un moment de vie, sur une bande originale réunissant quelques pépites (Jet, Bowie, Band of Horses...). Une réussite.

Guillaume Canet, le Ben Affleck français.

22/11/2010

Rodrigo y Gabriela @ Zénith de Paris

Cela fait plusieurs mois que la date de Rodrigo y Gabriela au Zénith de Paris est annoncée et attendue : le 19 novembre 2010. Mais c'est seulement cinq jours avant le concert que j'ai été invitée à y assister par une amie que je remercie encore. Parce qu'après les quelques minutes d'attente pour s'installer au premier rang des gradins, et l'impression d'avoir entendue la première partie pendant des heures, il ne faut qu'une ou deux petites secondes pour entrer dans l'univers de Rodrigo Sánchez et Gabriela Quintero. 


Wallis Bird est une jeune irlandaise qui a la particularité de jouer, en tant que gauchère, sur une guitare de droitier dont les cordes n'ont pas été inversées. Passé ce détail finalement inintéressant, on peut s'attarder sur sa prestation. C'est très simple, cette fille est une catastrophe ambulante. Malgré sa voix parfois atypique sur quelques notes poussées et rugueuses, Wallis Bird est aussi mauvaise que la réaction enthousiaste du public est incompréhensible. Comment une personne aussi dénuée de sensibilité artistique peut se retrouver en première partie de virtuoses comme Rodrigo y Gabriela ? Pourquoi maltraite-t-elle ses guitares ? Oui, "ses", parce qu'elle a quand même réussi en une demi-heure à casser les cordes de deux guitares, avant d'en demander une troisième qu'elle désaccorde tant son jeu est brutal et maladroit, pour finalement ne pas terminer sa dernière chanson. Une performance brouillon pour une gamine amatrice qui a l'insolence de présenter ses compositions comme étant "amazing". Humour ? Moi, une fille aussi irrespectueuse envers la musique, ça ne me fait pas rire. Elle lit sur un papier qu'elle parle français comme une vache espagnole, elle joue surtout comme un pied. Affligeante.

L'amertume s'envole lorsque le duo mexicain entre sur scène pour interpréter la délicate 11:11, leur chanson hommage à Pink Floyd, après avoir eu la classe d'attendre la fin d'un morceau de metal qui passait en musique d'attente. Ils enchaînent avec Hanuman, l'hommage à Carlos Santana, qui terminent de convaincre les plus sceptiques, s'il y en avait. Après ça, ce n'est que du plus, de la gourmandise, du bonheur à l'état pur. Il n'y a pas une seconde, une note de trop. Aujourd'hui, on parle souvent de talent pour n'importe quel groupe, à tort. Pour Rodrigo y Gabriela, on ne peut pas se tromper. Et en plus d'avoir du talent, ils ont la technique. Ils ont même la sérénité et la générosité. Que demander de plus ?
Peut-être que tout le public se taise. Car même si la majorité exprime sa joie de manière convenable (et sait taper en rythme dans ses mains), il en reste toujours certains qui font preuve d'impolitesse et gâchent le concert des autres. Pourquoi les gens parlent-ils pendant les chansons ? Pourquoi ? Et pourquoi un homme derrière moi appelle un copain pour lui rappeler son absence en riant ? Et pourquoi un autre ne cessait-il pas d'avancer vers la scène avec son sac à dos porté au-dessus de la fosse, gênant ainsi la visibilité d'un bon nombre de personnes derrière lui ? Et pourquoi y en a-t-il toujours un, très éméché, pour se croire à la Techno Parade ou à un match de tennis en sifflant des hymnes fédérateurs ou en criant des encouragements inutiles ? Autant de questions qui restent sans réponses.
Du côté des musiciens, si leurs compositions sont instrumentales, cela ne les empêche pas de prendre la parole en anglais, en français et en espagnol (quel plaisir !), quand ils en terminent une. En revanche, si la communication avec le public se transforme en véritable cohésion, le visuel n'apporte pas grand-chose, hormis les images des mains de Rod y Gab sur leurs guitares ou les jeux d'ombre sur la toile blanche installée derrière eux. Mais encore une fois, tant qu'il y a la musique... Dans ce flamenco rock ressortent clairement leurs influences venues du metal (ils ont joué dans un groupe de heavy metal appelé Tierra Acida, anciennement Castflow). D'ailleurs, alors qu'ils avaient livré un concentré de leur don au Printemps de Bourges 2010, ils ont le temps au Zénith d'annoncer la présence d'un invité surprise, un guitariste métalleux : Alex Skolnick, connu pour avoir joué dans le groupe de thrash metal Testament. Ils s'amusent lors d'un petit jeu à trois, se parlant par riffs interposés, puis font une démonstration de leurs capacités, sans prétention aucune.
Enfin, force est de constater que l'harmonie de Rodrigo y Gabriela en duo vient de deux talents incroyables et uniques, qui s'expriment pendant deux moments où chacun offre un solo, seul sur scène. Mais la plus belle magie vient du mariage de la guitare rythmique de Gabriela (a-t-elle une main bionique ?) à la guitare solo de Rodrigo.


Et parce qu'il faut faire le silence en soi pour recevoir une telle musique : comme Rod y Gab, on reste sans voix.

18/11/2010

Vampire Weekend @ Zénith de Paris

"Alors, c'était comment Vampire Weekend ?" Euh... C'est loin ça, il y a eu une nuit de sommeil entre la soirée et ce matin ! Mon sixième concert de VW... Mon sixième concert de VW ?! Serait-ce une coïncidence ? Suis-je maudite par le chiffre 6 ? Un neuf à l'envers... C'est l'enfer ! Muse, Misteur Valaire, et maintenant Vampire Weekend, le sixième concert n'est pas digne du talent du groupe. Tandis que pour MV à La Maroquinerie, la faute revenait surtout à leur dernier album, le concert de VW a subi les mêmes gênes que le deuxième concert de Muse au Stade de France : le public.


Tout d'abord, le show s'annonçait moins bon que les autres, tout simplement parce que le dernier concert parisien de VW avait été une apothéose : leur passage à l'Olympia. Pour assurer la première partie des quatre New-Yorkais dans le vent : Jenny and Johnny, des Américains de la côte Pacifique, qui ont commencé à 20 heures ; on les entendait déjà depuis l'allée menant au Zénith de Paris. En entrant dans la salle, il n'y a pas d'autre choix que de se diriger en gradins : la fosse est pleine à craquer. Le son est moyen, comme toujours dans cette salle ; les aigus sont insupportables et la voix féminine, aussi claire soit elle, fait très mal aux oreilles. Le groupe de Los Angeles joue une espèce de rock alternatif country. Il n'y a rien d'intéressant, rien de nouveau, rien qui mérite une attention particulière. C'est plat, mais ça a l'air de fonctionner, pendant quarante-cinq minutes, sur un Zénith bondé et réceptif.

Après une demi-heure d'attente, les vampires font leur entrée sur un beat de rap américain moins old school que le Jump Jump de Kris Kross à l'Olympia. Ils entament Holiday avec un son très moyen. La fosse semble amorphe. Ah ! Non ! Les gens sont tout simplement trop occupés à filmer les bras en l'air... Sur White Sky, le public se réveille, mais seulement sur le refrain. En revanche, le "merci" d'Ezra déclenche des cris hystériques, qui continuent sur les minibreaks de Chris, le batteur, pendant Cape Cod Kwassa Kwassa. Ce dernier est indiscutablement impressionnant de constance, et ce depuis leur premier passage à l'Album de la Semaine, en 2008. Pour le reste, la prestation est propre.
Avec l'enchaînement I Stand Corrected/M79, on comprend que la majorité du public ce soir ne réagit que sur les tubes : l'ambiance est morne sur la première, excessivement enthousiaste sur la seconde. Les gens ne savent même pas quand reprendre les chœurs, et ça les fait rire. Moi, ce qui me plaît, c'est plutôt de m'extasier (intérieurement) à l'écoute de la partie batterie sur Bryn (que le groupe n'avait pas joué à l'Olympia, mais ils avaient alors interprété Boston (Ladies of Cambridge)). Les essais d'Ezra pour modifier sa voix ne mettent même pas la puce aux milliers d'oreilles du Zénith... La version de California English sans les violons mimés au clavier vers la fin, c'est une idée ! VW délivre encore trois chansons de Contra, son deuxième album : Cousins, toujours efficace, Taxi Cab, lourde et hors tempo (Rostam, le claviériste, tente désespérément de suivre la lenteur des autres), et Run, égale à elle-même.
"Merci Paris. La prochaine chanson est très facile pour danser !" A-Punk résonne dans la salle, les gradins se lèvent enfin (pour se rasseoir à la fin du morceau). "Do you remember this one ?" One (Blake's got a new face). Le public a enfin compris, au bout de deux albums, comment répéter la phrase de ce titre de Vampire Weekend ! On revient à Contra avec Diplomat's Son, morceau sur lequel Chris, le bassiste, effectue quelques petits pas de danse, et Chris, le batteur, réalise une bonne performance. Le jeu de ce dernier est vraiment mis en avant ce soir, et c'est justifié ! Il donne une énergie incroyable, qui explose sur Giving up the gun. Le single bénéficie alors d'une belle intensité inattendue.
Vampire Weekend termine avec Campus et Oxford Comma sans interruption, pendant lesquels une seule silhouette saute, juste devant Ezra. Il y a bien évidemment toujours quelques crétins pour se plaindre de la durée du concert (une heure et quart), alors que VW a un répertoire de deux albums comportant des chansons relativement courtes. Bref.
Le rappel est annoncé par Rostam, disant en français que la mélodie de Horchata est simple et qu'on peut la reprendre ; le public des gradins se relève. Ensuite, Ezra, l'époustouflant chanteur-guitariste qui ne semble pas savoir faire de fausses notes, introduit Mansard Roof, leur "shortest song", en demandant au public de réaliser une chorégraphie très simple avec les doigts (un langage universel). Enfin, avant de clore presque traditionnellement sur Walcott, les quatre New-Yorkais déclarent que ce soir était leur dernier concert français de la tournée de Contra, et que la prochaine fois qu'ils reviendront, dans un ou deux ans, ils apporteront un troisième album. On peut donc conclure que la setlist de ce 17 novembre 2010, identique à celle de l'Olympia (à deux détails près), changera.


Je n'ai pas eu droit à I Think ur a Contra, et j'espère que cette malédiction du sixième concert ne s'applique qu'au sixième et à l'année 2010...

17/11/2010

Moi, moche et méchant - Pierre Coffin & Chris Renaud

Après avoir basé son teasing sur des minions hilarants, Universal Pictures présente Moi, Moche et Méchant, un film dans lequel l'armée des petites bêtes jaunes se révèle décevante. Mais hormis quelques petites faiblesses, ce dessin animé demeure efficace.

Le premier bon point revient au personnage principal, Gru, moche et méchant, dont le nom est emprunté aux services de renseignements militaires soviétiques, d'où son accent des pays de l'Est. Un méchant en héros, qu'est-ce que ça fait du bien !
Mais, dans le fond, il ne l'est pas. Son armée est constituée de "minions", il a peur de son petit chien monstrueux, et son cœur ne met pas longtemps à craquer pour les trois petites orphelines : Margo, la responsable, Edith, la rebelle, et l'attendrissante Agnes (la présence de cette dernière faisant beaucoup pour le film). D'autre part, avec les flashbacks, on comprend très vite que Gru n'est qu'un grand enfant cherchant sans cesse la reconnaissance de sa mère.
L'histoire (Gru entreprend de voler la Lune pour redevenir le plus méchant des méchants) est bien menée, grâce à un scénario original. Il y a quelques scènes aux gags moins drôles, mais rien ne traîne jamais en longueur. L'ensemble est vif et attachant, surtout à partir de la séquence du parc d'attraction ; et une pointe d'émotion bien dosée, sans mièvrerie donc, vient clore le film.

Un dessin animé sympathique, travaillé jusqu'au générique de fin !

12/11/2010

Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu - Woody Allen


Voilà un réalisateur dont on attend toujours les films : Woody Allen. Dans Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu, les histoires de plusieurs personnages plus ou moins liés sont racontées dans un Londres peu filmé. Le travail est concentré sur la direction d'acteurs et les situations plus que sur la ville.

Avec une belle brochette de comédiens, Allen réussit à exprimer ce qu'il a à dire, traitant des thèmes récurrents de sa filmographie : apparences et réalité, illusion et raison. L'un des personnages a terriblement peur de la mort, un autre comble son vide intérieur par la matérialité des choses, tandis qu'un troisième se terre lâchement dans le mensonge en reprochant à autrui la création d'une vie pour échapper au concret... En bref, les faiblesses humaines sont mises en exergue, révélant même une certaine médiocrité.
Pour en revenir au casting, malgré la présence de Anthony Hopkins, Antonio Banderas et Josh Brolin au casting, on retient plutôt les prestations féminines. L'Américaine Naomi Watts pour son interprétation plus que convaincante, avec son accent anglais parfait ; et Genna Jones dans le rôle de sa mère, aussi pathétique que tête à claques. Car, alors qu'on se prend de tendresse pour le personnage de Naomi, on ne ressent pas une once de sympathie pour celui de Genna.
Finalement, le réalisateur fait danser ses personnages névrosés sur une bande originale toujours efficace sans trop en faire, et sur la musique de la vie, tout simplement. C'est un film léger aux profondeurs noires, servi par un humour grinçant et des dialogues affutés. C'est drôle en même temps qu'énervant et déprimant. Woody Allen ne surprend plus, mais on a l'assurance de passer un bon moment.

Du Woody Allen.

31/10/2010

Trentemøller @ Bataclan

Le soir du lundi 18 octobre 2010 était un moment que j'attendais avec une impatience particulière : Trentemøller, prodigieux DJ et compositeur danois, prévoyait un concert au Bataclan. Un rêve. Après être tombée sous le charme de son premier album, The Last Resort (2006), et la sortie de Into the Great Wide Yonder cette année, son live s'annonçait comme une confirmation ultime. Alors, pourquoi ne suis-je pas ressortie comblée par ce show, un sourire persistant sur le visage ? Tentative d'explication.

À 19 h 45, il y a une file d'attente interminable sur le trottoir du boulevard Voltaire. Les portes du Bataclan ne sont-elles pas encore ouvertes ? En fait, l'organisation est simplement mauvaise : c'est seulement en arrivant à dix mètres de l'entrée qu'un vigile annonce que ceux qui n'ont pas besoin de passer par le vestiaire peuvent entrer... L'attente est insupportable, principalement à cause d'un groupe de banlieusards (ils se sont eux-mêmes nommés ainsi) gênant tout le monde avec des discussions inintéressantes et des mouvements brusques ; des intrus qui ne savent pas vraiment ce qu'ils vont voir, et qui se créeront un souvenir puisqu'ils ne pourront se rappeler du concert tant l'alcool coule dans leurs veines. Premiers signes ? Ce temps passé dehors fait manquer la première partie à la moitié du public. Un public majoritairement composé de Parisiens branchés et underground, mêlés à quelques Danois venus pour l'occasion.

Le premier rang m'appelle, mais, ce soir, ce sera celui du balcon. Le devant de la fosse étant déjà bien compact, et la fatigue ayant raison de moi, je décide de profiter depuis un siège. Première erreur ? Derrière le mur de rubans qui laisse entrevoir la scène, le DJ et ses musiciens arrivent, éclairés pas une faible lumière. Ils ouvrent sur The Mash and The Fury ; on retrouve alors la sensation vécue au concert de Fever Ray à l'Olympia en septembre dernier : une plongée dans un univers magique empreint d'une atmosphère sombre. La qualité musicale est là, servie par un son clair et bien réparti dans le Bataclan. Que pouvait venir perturber cette progressive entrée en matière ?
Après quelques chansons, d'autres rideaux de rubans s'abaissent, laissant apparaître deux jeunes femmes, qui chanteront entre autres Sycamore Feeling et Even Though You're With Another Girl. Pendant ces moments, le processus d'enchantement disparaît. Bien que la musique soit parfaite, les chanteuses "overlookées" brisent le sort en apportant mollesse et superficialité au show intimiste. Ces instants viennent par vagues, laissant donc parfois la scène aux seuls musiciens (un DJ, un batteur, un guitariste, et une guitariste). Mais à peine a-t-on le temps de se replonger dans un rêve avec Vamp ou de participer en tapant rapidement des mains sur Silver Surfer Ghost Rider Go que les sirènes maléfiques reviennent. Difficile de rester dans l'ambiance.
Être en hauteur rend la tâche d'autant plus difficile. La distance est bien présente, et l'on assiste au concert plus qu'on ne le vit. Heureusement, le batteur fabuleux, l'enchaînement absolument parfait Take Me into Your Skin/Miss You et le rappel prévisible mais efficace sur Moan viennent sauver l'ensemble mitigé. Attention, l'impression est mitigée car le niveau d'exigence était très élevé ; l'électro minimale puissante que livre Trentemøller, mêlée à du rock progressif et parfois mâtinée d'ambient, demeure excellente.

Sans les deux inutiles à voix, la formation est talentueuse, avec de vrais musiciens, qui prennent du plaisir et ne se regardent pas évoluer. Il ne reste donc qu'une seule question : suis-je blasée ?

26/10/2010

The Town - Ben Affleck


En 2007 sortait le très bon Gone Baby Gone, premier long métrage de Ben Affleck, dans lequel il donnait le premier rôle à son frère, Casey Affleck. Depuis, Casey se distingue devant la caméra, notamment dans The Killer Inside Me ; ce que Ben n'a jamais vraiment réussi à accomplir, faisant très souvent les mauvais choix de films. On attendait donc son deuxième travail derrière la caméra avec une certaine impatience. Coup double, il confirme ses talents de réalisateur et interprète parfaitement le personnage principal.

Adapté de Prince of Thieves, roman de Chuck Hogan, The Town se déroule à Boston, la ville natale de Ben Affleck. Une ville qu'il filme décidément très bien, dans ses moindres recoins. Après l'enlèvement d'une petite fille dans les quartiers plutôt bourgeois (Gone Baby Gone), il s'attaque au quotidien impitoyable de Charlestown, le quartier pauvre ; un microcosme où se côtoient prostituées, flics, assassins, employés de banque, voyous...
Et si ce film traite évidemment des nombreux braquages commis à Boston, remarquablement mis en scène (sans jamais en faire trop dans l'action), il s'attarde aussi sur les personnages et leur psychologie, servis par des acteurs authentiques comme le fougueux mais fidèle Jeremy Renner (Démineurs) ou la fragile mais battante Rebecca Hall (Le Prestige ; Vicky, Cristina, Barcelona). Dans l'histoire, il ne sont pas seulement acteurs : ils ont une véritable épaisseur qui permet de travailler des sujets tels que la difficulté d'appartenir à une communauté, l'amitié jusqu'à la mort et la rédemption.
Cette sensibilité donne notamment naissance à des scènes à deux très profondes (Doug MacRay et son père, Doug et l'agent du FBI, Doug et James...). Des scènes disséminées dans un film au scénario solide, toujours tendu, qui commence in medias res mais qui ne se presse jamais, révélant un vrai sens du suspens. Un film dans lequel les méchants révèlent une facette émouvante de leur personnalité, et inversement.

Ben Affleck, le Guillaume Canet américain.

22/10/2010

The Social Network - David Fincher

F5. Que celui qui n'a jamais appuyé sur cette touche du clavier pour actualiser sa "home" Facebook me jette la première pierre. Alors qu'on est en plein dans l'ère facebookienne, David Fincher, maître dans l'art de filmer intelligemment, réalise The Social Network ; un long métrage captivant sur la genèse et l'ascension du réseau social le plus addictif jamais créé, initialement appelé "The Facebook".

Mais plus qu'un film sur Facebook, c'est un film sur Mark Zuckerberg. Et plus qu'un portrait tragique sur le fondateur de Facebook, c'est une réflexion sur la solitude et l'emprisonnement du génie, le succès, la gloire et le pouvoir du système. Enfin, malgré la fortune de ce jeune homme odieux en même temps que touchant, c'est une histoire dans laquelle le plus important ne se trouve pas dans les chiffres mais dans les lignes de code.
The Social Network profite d'une mise en scène carrée, d'une structure astucieuse mêlant procès et flashbacks, d'une photo de caractère, et de dialogues travaillés et cinglants joués par d'excellents acteurs. Il y a d'abord les très bonnes performances de Justin Timberlake en Sean Parker, Andrew Garfield (Boy A, L'Imaginarium du Docteur Parnassus) dans la peau de Eduardo Saverin, et Armie Hammer (vu dans la série Reaper) qui joue le rôle des jumeaux Winklevoss. Mais il y a surtout Jeisse Eisenberg, aussi fascinant que déstabilisant. Son interprétation est d'autant plus réussie quand on connaît la personnalité complexe du plus jeune milliardaire du monde. Issu de Harvard, Mark Zuckerberg est asocial mais passionné, égoïste mais terriblement seul, inquiétant mais brillant, suffisant mais incompris.
Le réalisateur de Seven, Fight Club, Zodiac ou encore L'étrange histoire de Benjamin Button, signe un film composé de nombreuses séquences prodigieuses à montrer dans les écoles de cinéma, comme la scène d'introduction (l'échange entre Zuckerberg et sa petite amie dans un bar), la séquence du premier piratage (passionnante, même pour les non-geeks), celle de la compétition d'aviron (chiadée alors que relativement utile), et la dernière, tout en justesse et en sensibilité. Aussi, comment ne pas mentionner la perfection de la bande-son ? Trent Reznor sublime l'univers que crée Fincher ; une association qui avait déjà donné le clip de Only, une remarquable chanson de Nine Inch Nails.

I like.

17/10/2010

Elle s'appelait Sarah - Gilles Paquet-Brenner

Tatiana de Rosnay a écrit Elle s'appelait Sarah. Gilles Paquet-Brenner a réalisé l'histoire qu'elle raconte. Loin d'être aguicheur, le film mêle enquête historique et drame intimiste. C'est un long métrage fort et sensible qui travaille sur le temps, passé, présent, mais aussi futur, et qui donne à penser. Julia, une journaliste américaine installée à Paris depuis vingt ans, cherche à percer le secret que cache l'appartement de sa belle famille, dans lequel son mari souhaite habiter. Situé dans le Marais, il mène Julia dans les profondeurs de l'histoire de Sarah. Mais la vérité à un prix.

Quand La Rafle fait inéluctablement pleurer le spectateur, Elle s'appelait Sarah lui comprime la poitrine d'une douleur libératrice avant de le laisser verser une larme dans la dernière minute. Attention, il ne faut surtout pas s'embarquer dans une comparaison, car celle-ci n'a pas lieu d'être. Le film de Gilles Paquet-Brenner évoque bien évidemment la Shoah, mais ce n'est pas l'histoire, c'est le déclencheur de l'histoire. Elle s'appelait Sarah ne raconte pas un épisode de l'Histoire comme l'a fait Roselyne Bosch dans son film. Et le point de vue maîtrisé que le réalisateur propose vient surtout de Tatiana de Rosnay qui ne cesse de répéter que son livre a été parfaitement mis en images.
La réussite de cette adaptation vient aussi indéniablement du casting. Est-il nécessaire de dire que Kristin Scott Thomas est magistrale ? Personne d'autre n'aurait mieux joué le rôle de Julia. Et si on ne peut pas encore parler de classe en ce qui concerne la jeune Mélusine Mayance (dont le papa est directeur d'acteurs), on peut dire que c'est une véritable actrice, touchante, talentueuse et impressionnante de justesse. Côté masculin, Michel Duchaussoy et Niels Arestrup obtiennent la distinction magna cum laude ! Deux très grands. Bouleversants.
Avec eux, la volonté première du réalisateur (ne pas tomber dans le pathos) est noblement respectée. Gilles Paquet-Brenner a travaillé tout en finesse pour rester sobre, sans perdre la puissance de son film. Seule la fin trop riche en rebondissements aurait pu être évitée. Soutenu par une musique éloignée de toute obscénité (signée Max Richter), une photo délicate (de Pascal Ridao), et un montage intelligent (effectué par Hervé Schneid) mêlant deux histoires à des époques différentes (des histoires qui vont se rejoindre progressivement), Elle s'appelait Sarah possède une subtilité poignante trop rare dans la production cinématographique française d'aujourd'hui.

Un film beau, tout simplement.

13/10/2010

Misteur Valaire @ La Maroquinerie

La première fois avec Misteur Valaire, c'était en septembre 2008 pour le concert de bienvenue à l'université de Montréal ; plus qu'une découverte, une révélation. Après un passage à Radio Canada, un showcase à l'Apple Store de Montréal, un concert montréalais au Club Soda et un concert parisien au Batofar, en 2009, on ne pouvait manquer leur passage à La Maroquinerie, le 7 septembre 2010. Seulement, entre-temps, le groupe montréalais a sorti un autre album, Golden Bombay, plus vendeur mais moins bon que Friterday Night. Leur son était singulièrement original ; il reste remarquable mais plonge dans la hype.


Depuis quelques jours, on se demande pourquoi les températures sont si douces. C'est bien sûr parce que Misteur Valaire a ramené l'été indien à Paris ! Et dans la salle, la chaleur monte très vite. Enfin... pas pendant la première partie. DJ Fat Cat propose un set fade, sans aucun intérêt, enchaînant (sans originalité) quelques tubes et des vieilleries.

Annoncé à 21 h 25 à l'entrée de La Maroquinerie, MV entre en scène à 21 h 05 (sur leur programme, récupéré au dos de la setlist, ils étaient programmés à 21 h 10). Donc, pendant une vingtaine de minutes, la salle ne sera pas pleine. Cela n'empêche cependant pas le public de manifester sa joie dès Gumshoe. Malheureusement, les Québécois n'ont pas travaillé leur set en mélangeant les titres de leurs deux derniers albums (ils ne jouent plus les morceaux du premier, Mr. Brian) ; ils fonctionnent par phases. Il faut alors attendre six chansons (Lillehamer, Ave Mucho, Brandon Marlow, November Number 3, l'excellente Dan Dan, et Mojo Ego) avant qu'ils ne jouent It's All Good, To the Beat Sean, Plocul Black, SP 4 Lovers, Et si c'était un veau et Cass Hole, plutôt rapidement d'ailleurs.
Mais pourquoi les Valaire changent-ils les arrangements de leurs premières chansons pour les faire ressembler aux dernières ? Le groupe perd en identité et se perd dans une mer de bruits fédérateurs. Parce qu'on ne parle pas de l'effet MV, qui fonctionne à merveille, on parle de la musique elle-même et du travail de composition qui, dernièrement, semble avoir été basé sur les acquis de ces cinq musiciens. Les morceaux aux ambiances variées et progressives de Friterday Night sont raccourcis, légèrement remixés et se défont de leur complexité, de leur émotion, de leur sensibilité musicale. On entend certes le potentiel et le talent, notamment dans les percussions, les cuivres et les lignes de basse, mais l'esprit électro-jazzy se noie un peu trop dans le hip-hop électronique commercial. Toutefois, on a échappé à la présence des artistes en featuring sur leur dernier album.
Avant d'annoncer la dernière chanson, Mama Donte, ils interprètent Sweet Charlemagne, l'une des seules compositions de Golden Bombay aussi travaillée que l'intégralité de Friterday Night. Enfin, le rappel commence sur une version énergique et réussie de Monster Donte, idéalement placée. Ensuite, MV présente pour la première fois un nouveau morceau, Hip my Lips, qui se révèle être une version modifiée de Shaving. Encore une déception... Faire évoluer son style au fur et à mesure des albums, c'est un point positif, mais casser l'âme des anciennes chansons en les travestissant, c'est mal. D'autant que cela semble perturber le très bon batteur, Jules, qui, dans la soirée, fait deux petites erreurs aux platines. Quant aux autres, Luis a bien préparé son show (en antisèche sur la setlist), France se déchaîne à la basse, Drouin s'exécute sans savoir que le son du synté ne ressort pas assez (mais son saxophone bénéficie d'un bon réglage) et Roboto a ses petits moments de gloire au piano. Même si Gordon Bombay n'est pas la chanson adaptée à une fin de concert, on garde à l'esprit leur chorégraphie réalisée sur Et si c'était un veau, toujours aussi mythique. Car, il ne faut pas se méprendre, Misteur Valaire est un jeune groupe de haut niveau. Ils sont partis de très (trop) haut, et déçoivent aujourd'hui (mais pas ceux qui les découvrent avec Golden Bombay), tout en gardant leur intensité en concert.


L'ensemble demeure efficace et énergique, le détail moins intéressant qu'il ne l'était à l'époque de Friterday Night...

10/10/2010

The Runaways - Floria Sigismondi

Floria Sigismondi a réalisé de nombreux clips pour de grands artistes (de David Bowie à The Dead Weather en passant par Interpol, Muse ou encore Sigur Rós). Au cinéma, elle raconte l'histoire fulgurante du jeune groupe de rock féminin The Runaways. En partie produit par Joan Jett, le film est inspiré de Neon Angel, un livre coécrit par Cherrie Currie.

Entre le sang des règles de Cherrie Currie sur le bitume (existe-t-il un symbole plus féminin et rock'n'roll ?) et l'ouverture délicate, grâce à un coup de téléphone poignant, sur le futur succès de Joan Jett en solo, le spectateur bascule dans l'univers de Los Angeles en 1975. Le sujet aurait pu donner naissance à un long métrage clinquant et vide, mais, surprise, la réalisatrice n'est pas tombée dans le piège.
Car, du sexe, de la drogue et du rock'n'roll, ça aurait pu fonctionner tout seul pour faire payer le public. Surtout quand le chef opérateur de Gaspar Noé, Benoît Debie, est en charge de la photo, impeccable ; et quand la bande originale est aussi énergique, avec, entre autres, Rebel Rebel et Lady Grinning Soul de David Bowie, Fever de Peggy Lee, sans oublier les Runaways qui n'ont pas vieilli (notamment Cherry Bomb, de sa naissance à son apogée).
Il y a donc également une réflexion plus profonde, sur l'autodestruction et l'exploitation, portée par un bon casting. Michael Shannon semble avoir pris des acides pour interpréter le rôle du producteur, Kim Fowley ; et tandis que Kristen Stewart, en Joan Jett, joue le rock (et malheureusement, ça se voit), Dakota Fanning se métamorphose en Cherrie Currie, transpire le rock sensuel et dégage une grâce fascinante.

L'essence rock'n'roll est là. "Jack-fucking-pot" pour Floria Sigismondi et son équipe !

09/10/2010

The Prodigy @ Fête de l'Huma



Tout d'abord, il faut remettre les choses dans l'ordre, la Fête de l'Humanité n'est pas un festival musical ; c'est un rassemblement politique et festif, qui invite des groupes à se produire sur quelques scène, notamment la Grande. Malheureusement, depuis quelques années, avec une programmation de plus en plus alléchante, la fréquentation de cette fête ternit son image. Sous le prétexte de la tolérance, les gens, et plus particulièrement les jeunes (voire très jeunes) font n'importe quoi : alcool, drogue et impolitesse sont ce que l'on trouve le plus aux abords de la Grande Scène. Ailleurs, on peut encore déceler l'ambiance chaleureuse et le bon esprit communiste. Mais on est en 2010, le 10 septembre, dans une société capitaliste ; le parc départemental de la Courneuve est maintenant le lieu où se rencontrent l'utopie et la triste réalité.

Parce qu'il ne faut pas trop s'éloigner du sujet... The Prodigy.

Après avoir vécu leur show épique en fermeture de Rock en Seine 2009, en plein milieu de la barrière, difficile d'attendre quelque chose de leur prestation. Impossible de ne pas trouver tout "moins", impossible de se détacher de ce souvenir impérissable. D'autant que, après vingt-cinq pénibles minutes de retard, ils jouent presque la même setlist : World's on Fire/Breathe/Omen/Poison/Thunder (Dubstep)/Colours/Warrior's Dance/Firestarter/Run with the Wolves/Voodoo People/Omen (Reprise)/Invaders Must Die/Diesel Power/Smack my Bitch up/Take me to the Hospital/Their Law/Out of Space. Malgré l'ajout de l'enchaînement Thunder (Dubstep)/Colours et le changement de place de Their Law, l'impression de copier-coller demeure.
D'autre part, le son n'est pas à la hauteur de la puissance du groupe et, à part les premiers rangs, le public n'est pas vraiment réceptif, ou trop ailleurs pour l'être. À la barrière centrale, près de la régie, l'ambiance est loin de la folie violente que peut provoquer Prodigy. Pourtant, sur scène, Liam Howlett, Maxim Reality et Keith Flint sont des bombes d'énergie. Mais comment profiter d'un concert avec des allers et venues incessants devant soi et un bavardage bourdonnant dans les oreilles ?
Attention, la performance est honorable, et entendre les anciennes comme les nouvelles chansons du groupe reste un plaisir. Néanmoins, il ne se passe rien de plus : l'ensemble est décevant, ça fait mal au cœur de se sentir blasé et ce n'est même pas vraiment de la faute de Prodigy. Car, dans ces conditions, il est difficile de vivre le concert ; on hésite alors à tenir les représentants anglais de l'électro pour responsables. Après le show, lorsque la foule, compacte et irrespectueuse, se dirige vers la sortie, elle laisse derrière elle le site en piteux état. Déprimant.

En bref, déchéance humaine et impression de déjà-vu.

29/09/2010

Fever Ray @ Olympia


Après un Rock en Seine 2010 qui préparait la rentrée musicale, l'heure du premier show de la saison est arrivée. Le 9 septembre, Fever Ray devait jouer à La Cigale ; c'est finalement dans la mythique salle de l'Olympia que le groupe suédois a donné sa messe noire électro-pop et inspirée ; la première à Paris.


Le groupe qui ouvre la soirée était également attendu par quelques-uns : Zola Jesus. Deux claviéristes, à gauche et à droite de la scène, et une petite blonde à la voix au potentiel incroyable. Mais ça fait mal aux oreilles. Outre le fait que c'est la première fois que le son laisse à désirer à l'Olympia (enceinte qui crache, sur la scène, et beaucoup trop d'aigus), la chanteuse crie beaucoup, plutôt bien certes, mais elle crie quand même. Musicalement, c'est du "boum boum" et des claviers mimant des violons racoleurs. Le groupe essaie parfois de recréer l'ambiance de Fever Ray, mais c'est sans âme et répétitif, à l'image du jeu de scène. Est-ce que la chanteuse cherche quelque chose par terre ? Du talent peut-être ? À force de faire les cent pas la tête baissée, elle en devient fatigante, pour les yeux, et même pour les jambes, bien que tout le monde soit statique. Après un petit replacement de cheveux pour les photographes, elle descend de scène et fait des allers-retours rapides devant la fosse. Ce n'est vraiment pas convaincant : ça sent le fake. Mimer la sincérité est sûrement devenu plus facile...

L'attente est vraiment longue. Aller s'asseoir au balcon était tentant, mais quand on connaît un peu l'univers de Fever Ray, et qu'on est bien renseigné, on sait qu'il faut rester au plus près de la scène. Depuis quelques minutes, l'encens envahit la salle en même temps que la fumée d'ambiance. Les lumières s'éteignent mais, en coulisse, ils mettront quelques minutes à penser à fermer la porte sur la gauche de la scène, empêchant une totale immersion dans le monde captivant qui prend forme sous les yeux des spectateurs.
Avec ses musiciens masqués, Karin Dreijer Andersson entre sur scène tel un fantôme, avançant comme si elle ne touchait pas le sol, portée par la magie des notes de If I Had a Heart, avant qu'elle ne pose sa voix dessus. La setlist sera la même qu'en 2009 lors de leur concert au festival Pop Montréal (à une exception près). Après la même introduction que sur l'album, viennent donc Triangle Walks, Concrete Walls, Seven et I'm not Done. Les abat-jour qui s'allument par intermittence, les lasers qui fendent la brume et qui se reflètent par un jeu de miroirs millimétré créent une ambiance mystique teintée d'une rigueur légèrement terrifiante, qui se traduit également dans la performance purement musicale. Cachée sous un costume improbable, la moitié féminine de The Knife se veut chaman, entre la musique et le public. Mais la perfection de son interprétation et une certaine froideur mettent de la distance entre le groupe et ses fidèles. La communication passe uniquement par la musique, et ça continue avec la reprise de Mercy Street de Peter Gabriel ; agréable surprise que Fever Ray joue avec le plus grand respect. Un petit bonheur quand on n'a jamais eu la chance de l'entendre en live par son créateur.
La foule, hypnotisée, acclame les Suédois durant tout le concert, mais sans trop de folie. L'enchaînement Now's the Only Time I Know/Keep the Streets Empty for Me/Dry and Dusty est le point culminant, la montée transcendantale du show. Et une musique qui touche aussi profondément le corps et l'esprit capture l'énergie de ses auditeurs qui peinent à réagir après cette expérience. Pendant la reprise de Stranger than Kindness de Nick Cave, on hésite entre partir définitivement dans un trip d'introversion ou subir l'incantation du groupe motivée par l'un des musiciens muni d'un bâton de sorcier ancestral. On a à peine le temps de choisir que l'envoûtante When I Grow Up provoque un désir puissant de danser. Enfin, la reprise de Here Before de Vashti Bunyan propose une jolie mélodie de guitare, mais rien de plus. On sort alors un peu la tête de la brume, avant de replonger pour Coconut et ses vibrations finales œuvrant sur le corps comme pour le marquer d'un souvenir indélébile.


Avec Fever Ray, le mot création prend tout son sens.

12/09/2010

Mon Rock en Seine 2010

Rock en Seine accueille ses festivaliers sur un magnifique site classé : le domaine national de Saint-Cloud. Mais Rock en Seine perd, d'année en année, ce qui lui donne son nom : une vraie programmation rock. Pour cette édition 2010, sur les quarante-sept groupes invités, moins de la moitié valent vraiment le déplacement. Cependant, l'ambiance festival est là, on a l'impression de ne jamais être parti de Rock en Seine 2009 et, de toute façon, il est impossible d'assister à tous les concerts. Alors, on se fait son propre programme, sans oublier de petites pauses pour se sustenter et jeter un œil sur les expositions.


Vendredi 27 août :

Minus the Bear
Le festival s'ouvre sur une grosse averse très rock et la prestation tout à fait honorable de Minus the Bear. Sur la scène de la Cascade, le groupe américain livre une pop indie rock pas désagréable. On s'installe au deuxième rang et on se met doucement dans l'ambiance...

Band of Horses
On reste dans le rock américain sur la scène de la Cascade avec Band of Horses, originaire de Seattle comme le groupe précédent. La performance est carrée, ni transcendante ni médiocre, juste ce qu'il faut pour passer un bon moment. Un concert légèrement rehaussé par la belle progression de The Funeral en fin de set.

Foals
Vivre l'un des plus beaux moments d'un festival le premier jour, ça a quelque chose de magique et de triste à la fois. Magique parce qu'intense et unique, triste parce qu'on se dit que le temps passe trop vite et qu'il faut en profiter au maximum. Au Printemps de Bourges 2010, le concert de Foals se chevauchait avec celui de Two Door Cinema Club, alors on avait sacrifié la fin de l'un et le début de l'autre pour voir un peu des deux. Pour Rock en Seine 2010, le choix est très simple : le concert se vivra dans son intégralité, en plein milieu de la barrière. L'ambiance est électrique, le ciel menaçant. Dans la fosse, on a hâte que le groupe joue. Yannis, qui porte un t-shirt "Nirvana", arrive enfin sur scène avec ses musiciens. Ils commencent classiquement avec Total Life Forever avant que la foule ne se déchaîne sur Cassius. On se régale avec Miami et on se laisse complètement emporter par la folie sur Balloons, Red Socks Pugie, Electric Bloom ou encore Two Steps, Twice. Après quelques hésitations, Yannis descend même de scène avec sa guitare pour jouer plus près du public. Mais la véritable osmose, le moment le plus incroyable, a lieu lorsque le groupe interprète la merveilleuse Spanish Sahara. La pluie se met à tomber délicatement pendant l'intro et s'intensifie en même tant que la montée de la chanson. On est trempé quand vient l'explosion musicale... Fabuleux. La puissance du moment est renversante et panse les bleus qui apparaissent déjà sur les peaux meurtries par la barrière. Il faut du temps pour se remettre d'un tel instant.

The Kooks
Passer après Foals, c'est dur. Et malgré toute la bonne volonté des Kooks, et un public de fans avertis, il ne se passe pas grand chose. C'est énergique, oui. Mais sans âme, comme à la Fête de l'Huma en 2009. On essaie de se forcer à participer, mais on s'ennuie presque en rêvant du concert précédent. Le chanteur motive ses auditeurs, faisant également des signes aux plus récalcitrants, mais ces derniers ne font qu'attendre la suite.

Black Rebel Motorcycle Club
Voilà du rock, du bon, du lourd. Quand les trois membres de BRMC montent sur scène après un extrait de Be my Baby des Roonettes, on ne peut s'empêcher d'avoir une pensée pour leur ingénieur du son (et père du bassiste Robert Turner) décédé d'une crise cardiaque pendant le Pukklepop. Ils entament Beat the Devil's Tatoo et les fans manifestent chaleureusement leur ferveur. Dans un nuage épais, le groupe installe une ambiance profonde avec ses compositions travaillées, bientôt rejoint par des rayons aveuglants de lumière blanche. En live, le petit plus de ce groupe vient indéniablement de Peter Hayes, le chanteur-guitariste-bassiste encapuchonné. Ce talentueux musicien est entouré d'une bulle de mystère, et prouve que l'on peut être doué d'un charisme impressionnant, tout en discrétion. Jolie prestation !

Blink-182
Comme l'année dernière avec The Offspring, le festival offre à ses spectateurs de retomber dans leur adolescence marquée par des groupes de punk-rock américains. Et comme l'année dernière, même si, sur scène, il y a quelques petits problèmes de voix, on se surprend à chanter les paroles par cœur et à sauter en rythme. Voir Blink-182 en live, c'est un rêve oublié qui se réalise, la nostalgie atteignant son paroxysme pendant la mélancolique I Miss You. Entre chaque chanson reprise par des milliers de fans (Feeling This, The Rock Show, What's my Age Again ?, Stay Together for the Kids, First Date, All the Small Things, Reckless Abandon, Anthem Part Two...) le groupe communique avec son public, le plus souvent en faisant des blagues juvéniles et en plaçant quelques mots de français. Le concert est terminé, Underworld commence dans quelques minutes, mais on sait que le groupe réserve une surprise en rappel, alors on reste. Quelle erreur ont fait certains de partir... Dix minutes plus tard, le rideau tombe et dévoile Travis Barker harnaché au siège de sa batterie fixée sur une plate-forme ronde. Non seulement cette dernière tourne sur elle-même, mais elle effectue également un tour complet. Travis, batteur d'excellence à la puissance remarquable, se retrouve à jouer son solo la tête en bas, et toujours comme un surhomme. Un moment à graver dans les mémoires et dans l'histoire de Rock en Seine.

Underworld
Cette première journée se termine sur Underworld, mais il est extrêmement difficile de se tenir debout et d'aller au cœur de la fosse. Alors, on écoute bien sagement, au fond ; dans ce genre d'événements, ce sont les moins sages qui sont devant ! Malgré l'énergie du groupe et les souvenirs qui refont surface, on se dirige doucement vers la sortie, le corps épuisé comme s'il avait déjà vécu les trois jours du festival. Mais les oreilles, toujours à l'affut, entendent les premières notes de Born Slippy. Impossible de ne pas faire marche arrière pour vivre ce moment : un morceau de la bande originale de Trainspotting, en live...


Samedi 28 août :

Plan B
Quand on veut être à la barrière pour voir un artiste que l'on aime sincèrement, il faut arriver tôt et supporter les groupes qui passent avant. Parfois c'est sympa, parfois c'est un supplice. On se souvient encore de l'expérience douloureuse, en 2009, de Sliimy sur la scène de la Cascade, avant Les Petits Pois (Them Crooked Vultures). Cette année, c'est Plan B, sur la même scène. Pourtant, ça démarrait plutôt bien avec Faith SFX, un beatbox humain impressionnant. Mais le groupe fait son entrée, et c'est à la limite du supportable. Du hip-hop, du rap, du r'n'b, de la funk, de la soul (oui, on est toujours à Rock en Seine), et le tout en costume. Les musiciens sont statiques et loin d'être irréprochables techniquement, et le chanteur à l'air d'un banquier après sa journée de travail. Aucune classe, aucune émotion. À fuir !

Two Door Cinema Club
Les adolescentes émoustillées débarquent, c'est bientôt l'heure de TDCC. Pendant le show, dans les premiers rangs, ça pousse, ça saute, ça crie, ça chante. Sur scène, le groupe enchaîne les titres de son album à tubes (I Can't Talk, Something Good Can Work, Undercover Martyn, Eat That up, It's Good for You...), et semble ravi de jouer. Malheureusement, le chanteur a quelques problèmes de justesse ; et aussi festives soient les chansons, on n'attendait rien de grand après leur prestation au Printemps de Bourges 2010.

Jónsi
Écrire seulement trois points de suspension serait une solution de facilité, mais ça résumerait bien le fait qu'il est impossible de retranscrire tant d'émotion. En plein milieu, à la barrière, on ne manque rien de ce qui se passe sur scène ; Úlfur (qui a toujours son bras dans le plâtre), Jónsi, Alex et les autres préparent leur show. D'ailleurs, les essais micro de Jónsi procurent déjà un petit peu de bonheur ; on sourit avec les lèvres, mais aussi avec les yeux. Certains savent déjà depuis quelques heures que le matériel électronique de Jónsi est resté au Portugal et que le concert sera acoustique. Une expérience plus intime à vivre après son passage explosif au Bataclan le 7 juin. Le manager annonce la nouvelle, en français, à un public qui semble plutôt soulagé de ne pas entendre que le concert est annulé. Ensuite, pendant neuf chansons, on est transporté sur un nuage de douceur, le choix des morceaux s'étant probablement fait en fonction des possibilités d'interprétation en acoustique : Stars in Still Water, Icicle Sleeves, Kolniður, Boy Lilikoi, Sinking Friendships, Tornado, Saint Naïve, Go Do et une version écourtée de Hengilás. Côté spectateurs, ce ne sont pas les mêmes que ceux du 7 juin au Bataclan (ils applaudissent alors que Tornado n'est pas terminée, par exemple), mais ils semblent happés par la magie islandaise. En même temps, rien de plus normal : les génies se font rares, et quand on en découvre sur scène, comme ça, par hasard, dans un festival, cela doit être poignant. Quant à moi, je suis dans une bulle ; ça se passe entre eux et moi, et je me retiens de pleurer...

Queens of the Stone Age
Après le trop court moment islandais, et la difficulté à déserter l'espace devant la scène de la Cascade pour cause de frustration, on se dirige doucement vers la Grande Scène où va se produire QOTSA. En chemin, la voix de Josh Homme se fait entendre sur une énumération de diverses drogues : Feel Good Hit of the Summer. En plus d'être un chanteur d'exception, Homme est un guitariste incroyable, et son charisme rameute presque la totalité des festivaliers, de la même façon qu'il avait attiré la fosse le 29 février 2008 au Zénith de Paris. L'année dernière, sa venue à Rock en Seine avec TCV était restée secrète jusqu'au dernier moment (sauf pour certains), et beaucoup n'ont donc pas assisté au concert. Cette année, les fans de Josh se sont déchaînés sur treize chansons de rock des cavernes, dont Sick, Sick, Sick, Misfit Love, et un final (ressemblant à celui de leur passage au Zénith en 2008) sur Go With the Flow, No One Knows et Song for the Dead, avec un batteur toujours aussi dingue ! De la qualité, mais pas mieux qu'en salle.

LCD Soundsystem
Évidemment, devant la scène de la Cascade, une foule dense s'est installée. Alors, sans trouver la force physique de se plonger dans cette fosse motivée, on profite du show depuis les derniers rangs. LCD Soundsystem aurait facilement pu remplir la fosse d'une Grande Scène, mais les concerts à sonorités un peu électro semblent bannis de celle-ci. Le public apprécie vraiment la prestation du groupe, qui joue, entre autres, Drunk Girls, l'excellent Daft Punk is Playing at my House et Tribulations. Mais Massive Attack va commencer sur la Grande Scène, donc on part pendant Yeah, déchiré de ne pouvoir assister à la fin inévitable que l'on entend de loin : New York, I Love You but You're Bringing me Down, suivie d'une cover d'Empire State of Mind de Jay-Z et Alicia Keys.

Massive Attack
L'amertume de ne pas avoir profité de la fin du concert d'LCD Soundsystem disparaît dès les premières secondes de la performance de Massive Attack, qui commence par United Snakes et sa batterie énergique mêlée à des voix planantes. Une claque. Violente. Pendant tout le show, leur musique trip-hop se répand sur le Domaine de Saint-Cloud, et ce jusque dans les tripes du public. Le son est étonnamment très bien réglé ; et de la première à la dernière chanson, en passant par un enchaînement divin Teardrops-Angel, c'est un trip total, magnifié par un visuel intelligemment travaillé (défilé de chiffres, de marques et de titraille française au contenu déprimant). Impossible de ne pas être en transe jusqu'à la dernière note de Atlas Air qui clôt la setlist, et même encore après. Car, c'est un peu machinalement que l'on se dirige vers la scène de la Cascade où 2 Many DJ's se produit. Et, finalement, l'envie de rester dans l'ambiance moelleuse que le groupe de Bristol a créée est plus forte. On laisse donc le mash-up des DJ belges aux clubbers du samedi soir...


Dimanche 29 août :

The Temper Trap
Le programme de la journée est loin d'être fantastique, mais il commence avec les très bons The Temper Trap sur la Grande Scène. Leur travail en studio n'est pas trompeur ; le groupe australien assure en live. Après deux premières chansons abîmées par des petits soucis de réglages de micro, Dougy Mandagi place sa voix et peu enfin monter tranquillement dans les aigus. Dotées de lignes de basse solides, de guitares électriques faisant croire que le ciel n'est plus gris, et d'une batterie efficace, les compositions travaillées de la formation élèvent le niveau des groupes qui gagnent à être connus. C'est une belle confirmation, et c'est agréable.

The Black Angels et Eels
Sur la scène de la Cascade, The Black Angels déçoit. C'est mou, répétitif et le son est mauvais. Peut-être faudrait-il voir le groupe dans un cadre plus intimiste ? De l'autre côté, sur la Grande Scène, on découvre Eels qui tente de s'en sortir, en vain. C'est fade, c'est vieux, et l'énergie n'est pas là. On se déplace de scène en scène, mais on s'ennuie partout...

I Am un Chien
Et enfin, pour la première fois en trois jour de festival, on est attiré vers la scène de l'Industrie, où l'envie semble se montrer. Sans artifice et sans prétention (et ce dernier point est étonnant), I Am un Chien délivre son électro-rock avec enthousiasme et passion. Ce n'est pas transcendant au niveau musical, mais ça fait son effet sur le public. David Fontao, qui fait de la pub pour son frère en portant un t-shirt "Stuck in the Sound", est sincèrement ému de se produire à Rock en Seine. Mais les moments les plus touchants sont ceux qu'il partage avec son frère José (chanteur de Stuck in the Sound, donc, et de You!), qui le rejoint sur scène le temps de deux ou trois chansons (et confirme par ailleurs son talent vocal). Il y a une réelle complicité entre eux, les regards et les échanges sont forts ; c'est tellement sincère que, à la fin d'un des morceaux, ils se jettent dans les bras l'un de l'autre.

Beirut
Côté sincérité, on ne peut pas en dire autant de Beirut. Il n'y a aucune étincelle, le son est désagréable et les chansons se ressemblent toutes. Avec leurs instruments en grand nombre, les musiciens essaient de dissimuler leur manque de magie et de talent. Errer dans le festival semble être une solution plus supportable que de rester là à ressasser l'idée qu'on est censé être dans un festival de rock.

Crystal Castles et Arcade Fire
Depuis plusieurs mois, une question se pose : qui choisir pour clôturer son propre festival quand on aime les deux groupes programmés en soirée, à la même heure ? Les organisateurs de Rock en Seine ont créé un vrai problème. Un dilemme 100 % canadien. Arcade Fire, la Grande Scène où s'est produit The Prodigy l'année dernière, et une foule reprenant les refrains entêtants, ou Crystal Castles sur la plus petite scène, avec la même énergie que The Prodigy l'année dernière, et un public enflammé ? Quelques heures avant le début de ces concerts, c'est CC qui gagne le match pour finir dans la folie et les coups, comme l'année dernière. Seulement, le public n'est pas le même... Absents les hommes virils et la violence franche ; présents les adolescents défoncés par l'alcool et les cigarettes pleines de produits illicites. Après une longue attente pour être sûr d'avoir une place devant, le groupe d'électro screaming fait son entrée, et c'est parti pour le gâchis. Sur scène, ça hurle et c'est intense. Dans la fosse, ça hurle et c'est pénible. Entendre "Aaaaaliiiiice" dans ses oreilles pendant les deux premiers morceaux, c'est juste insupportable. Direction la Grande Scène, parce qu'un concert de CC, ça ne se vit pas à l'extérieur de la fosse. Le sentiment de frustration est si intense que la fin du festival est déjà gâchée. Savoir qu'un concert qu'on avait vraiment envie de voir se déroule à quelques dizaines de mètres rend la prestation d'Arcade Fire moins captivante. D'autant que leur performance bien sage est interrompue par une pluie torrentielle, qui n'arrête pourtant pas Alice que l'on entend s'époumoner au loin... Un quart du public a déjà quitté les lieux, mais, de toute façon, AF ne revient sur scène que pour jouer Wake à sa fanbase. Le show n'a rien d'extraordinaire, comme on l'entend souvent à propos des lives de ce groupe. On repart, trempé, avec l'assurance que ce concert restera dans les esprits surtout à cause des conditions météorologiques...


Même si cette édition de Rock en Seine se termine sur une note moite et décevante, on sait qu'on reviendra l'année prochaine, avec l'espoir d'une programmation plus rock et moins d'attente concernant la clôture, qui ne sera jamais aussi puissante que celle de l'édition 2009.